Après avoir été aidant naturel pendant cinq ans pour trois membres de sa famille, Pierre-Paul Alain revient au jeu
Carolyn Richard
Le comédien Pierre-Paul Alain avait une carrière d’acteur bien amorcée et avait joué entre autres dans Destinées et Toute la vérité lorsque la maladie a frappé sa famille de plein fouet. Après une période difficile comme aidant naturel pour sa sœur, son père et sa mère, il revient en force au petit et au grand écran cet automne.
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Pierre-Paul, depuis la fin de Destinées et de Toute la vérité, tu as quelque peu disparu du petit écran... Mais, cette année, tu joues dans plusieurs séries ainsi que dans le film Arsenault & Fils. C’est un grand retour pour toi!
Oui, je vis vraiment une belle période présentement. Je me suis absenté du milieu artistique pendant environ cinq ans, car je vivais des choses très éprouvantes dans ma famille. Ma sœur ainsi que mon père ont eu le cancer en même temps... au point où ils recevaient leurs traitements l’un en face de l’autre. Et peu de temps après, ma mère a elle aussi commencé à être malade. Elle souffrait entre autres d’hypotension, mais avec le temps, ils ont découvert qu’elle était atteinte de l’atrophie multisystématisée, le parkinsonisme atypique. Puis, quelques mois après ce diagnostic, on a appris que mon père souffrait d’alzheimer.
Et tout ça est arrivé dans la même période?
Je sais, c’est dur à croire. C’était comme un cauchemar. La maladie a frappé ma famille de plein fouet, au point où je me demandais si mon tour s’en venait. J’ai été épargné, mais je suis devenu l’aidant naturel des trois, c’est pourquoi on ne me voyait presque plus depuis 2015.
Tu savais que ta vie prenait une autre direction...
Absolument. Et comme j’ai été élevé dans une famille très unie et aimante, je ne me suis même pas posé la question: ma place était auprès d’eux, et c’était impossible pour moi de ne pas m’occuper d’eux. Quand j’étais jeune, mes parents m’ont tellement donné... Ils m’ont aussi encouragé à faire ce métier. Ma mère venait avec moi pour que je passe mes auditions. Alors, cette fois-ci, c’était à mon tour d’être là pour eux, tout simplement.
Et aujourd’hui, comment se porte ta famille?
Ma mère est décédée peu de temps avant la crise reliée à la covid-19. Ma sœur est en rémission et elle va bien. Mon père s’est remis de son cancer, mais avec son alzheimer, ce n’est pas facile. J’avoue que ç’a été cinq années très difficiles à traverser, et en plus, la pandémie a suivi.
Comment as-tu fait pour garder la tête hors de l’eau?
J’ai la chance d’être bien entouré. Autour de moi, j’ai des êtres exceptionnels, et ils ont fait une grande différence. Je pratique beaucoup de sports, surtout les arts martiaux, alors j’ai quand même une bonne discipline et un mode de vie sain.Tout ça a aidé à ne pas sombrer.
Réussissais-tu quand même à gagner ta vie?
Oui. Je me suis débrouillé avec des emplois ici et là; je me trouvais du travail qui me permettait aussi d’avoir assez de temps libre pour bien m’occuper d’eux. Après le décès de ma mère, ça m’a pris quelques mois pour m’en remettre et regarder en avant. Après un certain temps, j’ai recommencé à travailler dans mon domaine, mais à l’arrière-scène. Je me suis trouvé un emploi comme assistant de production sur des plateaux de tournage et j’ai aimé ça.
Était-ce ton choix de ne pas travailler comme acteur durant cette période?
Non. J’allais quand même passer des auditions, mais j’avais tellement la tête ailleurs avec ma situation familiale que même si je me donnais à 100 %, je portais en moi une lourdeur qu’on devait sentir. Je faisais ce que je pouvais, mais... j’étais visiblement en mode survie. Et quand la pandémie a frappé, puis que tous les tournages ont cessé, j’ai décidé de me trouver un emploi plus sûr, à ce moment-là. Je suis allé travailler dans une usine qui fabriquait... des vaccins! (rires)
Bonne idée!
Disons que mon CV d’acteur ne les a pas vraiment impressionnés, mais ils m’ont donné une chance. J’ai été préposé technique. Comme ma carrière d’acteur a commencé quand j’étais très jeune, c’était nouveau pour moi d’avoir un emploi régulier avec un salaire stable et des assurances. Après deux mois, je me suis même fait proposer un poste de chef d’équipe! Alors, j’ai suivi une formation en virologie. Je me suis très bien débrouillé. Cependant, jouer me manquait vraiment, et ma mère m’avait dit avant de partir de penser à moi, car elle voyait qu’avec toute cette situation, je ne le faisais plus. Par contre, je n’ai aucun regret d’avoir mis ma carrière sur la glace pour être là pour eux.
C’est tout à ton honneur. Et quand as-tu ressenti le désir de revenir au jeu?
Ces cinq années d’épreuves et de vécu que je venais de traverser m’avaient grandement nourri comme acteur, et je me sentais prêt à camper des rôles comme jamais! J’étais vraiment motivé et libéré mentalement. Il n’y a rien dans la vie que je veux faire à part être un acteur. J’ai finalement passé une audition pour le film Arsenault & Fils, et c’est le réalisateur Rafaël Ouellet qui m’a appelé pour m’annoncer que j’avais décroché le rôle.
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Et comment as-tu réagi?
J’avais de la difficulté à y croire! Tellement, même, que sur le coup, je l’ai envoyé promener. (rires) Après, je lui ai dit: «J’étais en train de mourir et tu viens de me redonner la flamme et l’espoir d’un retour possible.»
Et à partir de là, les rôles se sont enchaînés, car tu joues dans plusieurs séries cet automne. C’est reparti en grand pour toi!
Merci. J’avoue qu’avec tous ces rôles que j’ai décrochés dans de beaux projets comme Hôtel, Anna et Arnaud, Les mecs 3, Avant le crash et d’autres dont je ne peux parler pour l’instant, je me sens vraiment choyé!
Est-ce que ta vision du métier a changé vu ce que tu as vécu durant ces années face à la maladie?
Honnêtement, j’ai fait toutes sortes de jobs pour traverser cette période difficile, alors je crois que ça paraît que j’ai une grande reconnaissance du fait de continuer à jouer maintenant. J’ai même déjà ramassé de la merde de cheval sur le plateau d’une série américaine de Disney, alors je dois être l’acteur qui, parmi ceux les plus heureux de se retrouver sur un plateau, l’apprécie le plus! (rires)
C’est vraiment un retour en force. As-tu le sentiment que ta mère y est pour quelque chose?
C’est certain. Tu me poses la question, et j’en ai des frissons. Je sais que ma mère veille sur moi et je pense qu’elle a aligné les étoiles sur mon chemin.
Anna et Arnaud, mardi 20 h, à TVA.
Hôtel, jeudi 20 h, à TVA.
Avant le crash, lundi 21 h, à Radio-Canada.
La saison 3 des Mecs sera disponible dès le 3 novembre sur Tou.tv Extra.
