Cet oiseau est plus fort qu’un météorologue

Cécile Otis, magazine Dernière Heure

2022-03-16T13:00:00Z

Si, afin de faire des prévisions pour la saison des ouragans, les météorologues consultent des bases de données et utilisent divers programmes de modélisation, ils pourraient bientôt se tourner vers la grive fauve. En effet, selon un chercheur, cette espèce d’oiseau serait capable de prédire les pires saisons cycloniques, et ce, des mois à l’avance.

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Pour Christopher Heckscher, ornithologue et professeur associé au Département des sciences environnementales à l’Université du Delaware, il ne fait aucun doute que les météorologues ajouteront ce «nouvel instrument» à leur boîte à outils! 

Dans ses travaux de recherche, publiés sur le site Scientific Reports, il fait état de ses observations sur la grive fauve et il établit un lien surprenant entre le comportement de cette espèce de passereau et le phénomène climatique de la saison des ouragans. 

Tous les printemps, depuis des millénaires, la grive fauve effectue une migration à partir du sud de l’Amazonie vers le nord, dans une zone située entre le Delaware et le Canada. C’est dans cette zone, plus précisément dans le parc d’État White Clay Creek, que M. Heckscher a étudié ces oiseaux sur une période d’une vingtaine d’années. 

Première clé: la durée de la saison des amours

Ses recherches lui ont permis de constater une corrélation entre la durée de la saison de reproduction annuelle de la grive fauve, le nombre d’œufs qu’elle pond et la gravité de la prochaine saison des ouragans. Selon lui, cet oiseau peut prévoir l’intensité et une fréquence hors de l’ordinaire des ouragans, et il s’y adapte. 

«Ces oiseaux ont évolué de concert avec les tempêtes de l’automne, au cours de leur période de migration, pendant des milliers d’années – en théorie –, sinon plus. Il serait logique qu’ils se synchronisent, à un moment donné, avec le climat à l’échelle mondiale», explique le chercheur au Delaware News Journal.

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Christopher Heckscher a comparé les données de reproduction et de migration qu’il a colligées au cours des 20 dernières années avec l’indice de l’énergie cyclonique accumulée, qui mesure la force et la durée de toutes les tempêtes nommées au cours d’une saison des ouragans. 

«Je me suis rendu compte qu’au cours des années où ils arrêtent de se reproduire plus tôt, il y a plus d’activité de tempêtes tropicales sur leur route de migration, déclare l’ornithologue. J’ai eu cette idée, j’ai testé l’hypothèse, j’ai regardé les données, mais je ne m’attendais vraiment pas à ce qu’il y ait un lien. C’était une corrélation vraiment forte.»

Deuxième clé: le nombre d’œufs

Et ce n’est pas tout: le professeur a également noté que lorsque les grives pondaient davantage que les deux à quatre œufs habituels au cours d’une saison, cela annonçait des ouragans plus intenses!

D’où leur vient cette étonnante capacité? Heckscher soupçonne que cette espèce peut détecter quelque chose dans l’atmosphère ou dans l’environnement que les météorologues ne voient pas ou ne regardent pas. 

«Quoi qu’il en soit, c’est quelque chose que ces oiseaux ont déjà compris à la mi-mai, au plus tard», dit-il. Chose assez extraordinaire quand on sait que la saison des ouragans de l’Atlantique atteint un pic en août et en septembre, trois ou quatre mois plus tard.

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