Élizabeth Tremblay-Gagnon est comblée par sa nomination aux Gémeaux pour son rôle dans Toute la vie

Mélanie Bernier

Jean-François Brassard

2021-08-04T13:00:00Z

En mars dernier, grâce à sa prestation dans Toute la vie, elle remportait la zapette d'or de la révélation de l'année. Et voilà qu'en septembre prochain, elle pourra repartir du gala des prix Gémeaux avec une des convoitées statuettes. À 24 ans, le parcours d'Élizabeth Tremblay-Gagnon, atteinte de dyslexie-dysorthographie, est aussi atypique que son cheminement. Admirable.

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La voix est lumineuse. On a affaire à une jeune femme qui apprécie les cadeaux que la vie lui apporte, d’autant qu’elle partait avec de sérieuses difficultés à surmonter. Et son rôle d’Éloïze, une adolescente ayant une déficience légère dans la série Toute la vie, diffusée à Radio-Canada, a des retombées auxquelles elle n’aurait osé rêver. Élizabeth a du bagou et n’esquive jamais les questions, qu’elle accueille toujours avec ouverture. Elle n’est jamais sans mot. Sauf le jour où son agente lui a appris que son nom était cité parmi les finalistes d’un prix Gémeaux, dans la catégorie Premier rôle féminin: Série dramatique annuelle. 

Véro Boncompagni-2020
Véro Boncompagni-2020

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«Je suis rarement bouche bée, car je parle beaucoup, mais j’ai été carrément sous le choc. Aucun mot n’a pu sortir de ma bouche. Ça m’a pris cinq minutes avant d’être capable de lui dire que j’allais la rappeler.»

Le premier témoin de cette scène a été son copain, Jules, qui partage sa vie depuis plus de quatre ans. «C’est un garçon de peu de mots. Il m’a serrée dans ses bras. Je pense qu’il m’a dit qu’il était fier.» Pendant une belle grosse heure, Élizabeth était au septième ciel. Revenue sur terre, elle a fait le tour de la parenté pour propager la bonne nouvelle. «Je suis allée voir mon père et surprendre ma mère, puis j’ai appelé ma sœur et mon frère.» 

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Le dernier — mais certainement pas le moindre — à recevoir la bonne nouvelle a été son coach, Martin Perreault. «C’est avec lui que j’ai travaillé pour le personnage d’Éloïze. D’ailleurs, je prépare toutes mes auditions et tous mes rôles avec lui. C’est un super coach et un super ami. Il me permet d’arriver à 100 % de mon potentiel chaque fois. Ça m’amène une paix d’esprit.» On peut imaginer la fierté d’Élizabeth et de sa garde rapprochée, surtout lorsqu’on jette un œil sur les noms des autres finalistes: Maude Guérin, Sophie Prégent, Geneviève Brouillette, Catherine St-Laurent et Marina Orsini. 

ENTRE HÉLÈNE ET ROY

En raison de la pandémie, la jeune comédienne n’a pu aller sur le terrain pour se préparer à jouer le rôle d’Éloïze, mais Martin Perreault a été d’une aide précieuse. «Ce qui est merveilleux avec lui, c’est qu’il coache beaucoup de jeunes ayant des déficiences intellectuelles. Il fallait faire attention de bien représenter ces jeunes-là. Les nuances étaient importantes.» Lorsqu’elle a su où elle s’en allait, Élizabeth s’est amusée. «Quand j’ai un public, je suis un petit clown sur un plateau de tournage. En plus, Hélène (Bourgeois Leclerc) est comique. Elle a un tel sens du timing et de la comédie! Elle est aussi élégante et est un super exemple pour les jeunes comédiens.» 

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Dans la scène que les producteurs de Toute la vie ont choisi de soumettre aux Gémeaux, Élizabeth donne la réplique à une autre pointure, Roy Dupuis. On imagine facilement que l’énergie qu’il dégage est à mille lieues de celle d’Hélène Bourgeois Leclerc! «C’est totalement un autre monde, reconnaît d’abord Élizabeth. Il est très mystérieux, et on se pose toujours la question: “Qu’est-ce qu’il pense de moi?” Mais, après avoir tourné cette scène, où je suis dans le coin de la chambre après avoir volé des items, il m’a dit: “J’ai vu énormément de choses dans ce que tu viens de faire.” Il n’a rien dit d’autre, mais j’ai compris que j’avais eu son approbation.» 

Comme son Jules, Roy est un homme de peu de mots, mais la portée de ses paroles n’en est que plus percutante.

Elle n’a aussi que de bons mots pour Brigitte Lafleur et Pierre-François Legendre, qui jouent ses parents. Et eux aussi sont finalistes pour un prix Gémeaux! Dans l’attente du gala, qui aura lieu le 19 septembre, Élizabeth a reçu la Zapette d’or de la Révélation de l’année, qui lui a été décernée le 30 mars dernier à l’émission C’est juste de la TV. Candide, elle avoue: «Je ne connaissais pas les Zapettes d’or avant de recevoir la mienne. Je la garde tout près, sur mon bureau. Elle a tellement une belle signification! Avec ma nomination au Gala des prix Gémeaux, on dirait que je suis entrée dans les ligues majeures. Je suis comblée. À 24 ans, je ne pensais pas que c’était possible d’être fière comme ça.» 

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LE DIAGNOSTIC TOMBE

Élizabeth a toutes les raisons du monde d’être fière d’elle. Enfant — la famille était alors établie à Québec —, elle a dû surmonter toutes sortes de difficultés. «J’ai toujours eu du retard, mais, quand j’étais jeune, on n’était pas vraiment capable de mettre le doigt sur ce que j’avais. C’est à 15 ans que j’ai su.» Diagnostic: Élizabeth était et demeure atteinte de dyslexie-dysorthographie. «Ce sont comme deux batteries positives; l’une n’aide pas l’autre. Ça me prenait toujours un peu plus de temps pour assimiler la matière. On n’apprend pas tous de la même façon et au même rythme. Si j’avais étudié les mathématiques en chantant, je les aurais probablement apprises par cœur.» 

La dernière affirmation n’est pas lancée en l’air, la jeune fille ayant eu tôt fait de développer son sens artistique. «Rapidement, je me suis collée à ça. On m’a inscrite dans un programme particulier qui m’a laissé de la liberté. Je faisais beaucoup d’activités parascolaires. C’est là que je m’illuminais. Je faisais de l’animation de galas et de l’improvisation, j’étais dans le conseil étudiant... Je touchais à tout.» Parfois envers et contre tous, ses parents l’ont toujours encouragée. 

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«Ils sont extraordinaires! Ils ont voulu m’inscrire dans des écoles artistiques à Québec, mais, à cause de mes notes, je n’étais pas acceptée. Finalement, à l’agence Mode é Arto, j’ai appris la diction, les rudiments du jeu... J’ai aussi fait partie de la comédie musicale Annie, qui a été un grand succès à Québec.» Avec son père, Jean-François, elle 

MARIO BEAUREGARD/AGENCE QMI
MARIO BEAUREGARD/AGENCE QMI

a même participé à l’émission L’heure de gloire, animée par René Simard. Toute médaille a son revers et, à cette époque, en plus de ses difficultés d’apprentissage, Élizabeth a été victime d’intimidation.


«Ça n’a pas été facile... Les jeunes peuvent être méchants. Encore aujourd’hui, il y a de l’incompréhension. Mais je suis qui je suis aujourd’hui à cause de ce parcours-là. Il faut apprendre à pardonner, mais j’ai encore du travail à faire et des choses à apprendre de ça. Il ne faut pas que je laisse le poison des personnes méchantes m’affecter.»

BOUCLER LA BOUCLE

S’il ne l’avait pas su, jamais le journaliste n’aurait pu se douter, au cours de cette rencontre de près d’une heure, que la jeune femme formidablement articulée est atteinte de dyslexie-dysorthographie. C’est à l’écrit qu’elle éprouve des difficultés. «Parfois, j’écris un texte et je suis sûre qu’il n’y a pas d’erreur parce que je l’ai vérifié et revérifié. Même si je pense qu’il n’y a aucune anomalie, il s’avère qu’il y en a plein... Mon regard les perd. C’est vraiment spécial...» 

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Nécessairement, la comédienne s’applique d’autant plus lorsqu’elle a un script entre les mains: «Pour l’apprentissage des textes, il faut que je les pratique beaucoup pour les apprendre par cœur. Ensuite, je laisse l’émotion couler.» Déterminée, Élizabeth Tremblay-Gagnon l’est depuis son jeune âge. Et ce trait de sa personnalité est profondément ancré en elle. À preuve: «Je n’ai pas fini mon secondaire, et je pense me tourner vers l’éducation aux adultes. Ce serait une belle boucle à boucler. Mon message est de persévérer, même si on n’a pas de bonnes notes académiques ou de diplôme secondaire.» 

Le Gala des prix Gémeaux sera diffusé en direct le 19 septembre à 20 h, à Radio-Canada.

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