Jean-Charles Lajoie revient sur sa première nomination Artis

Photo : Patrick Seguin

François Hamel

2020-08-31T18:54:33Z
2023-10-12T23:47:05.216Z

«Sur le plan personnel, ç’a été une année mouvementée», avoue Jean-Charles Lajoie sur la terrasse de sa résidence, dont il a lui-même dessiné les plans, tout comme ceux des aménagements sur son terrain. Le fougueux animateur de JiC y va de révélations surprenantes qui nous laissent découvrir un être sensible, franc, protecteur, un homme de clan et de famille. Marie-Manon, sa conjointe, a participé au début de l’entretien.

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Jean-Charles, vous nous accueillez aujourd'hui avec votre conjointe, Marie-Manon. Depuis quand formez-vous un couple?
Jean-Charles: Ça fera 30 ans le 13 juillet 2021. Nous avons fait connaissance au resto-bar La Maison blanche, à Granby. Je faisais partie d’une ligue d’improvisation, et les joutes se déroulaient là. J’avais 19 ans.
Marie-Manon: C’est moi qui l’ai choisi. (sourire) Quand je l’ai vu, je me suis dit: «C’est l’homme de ma vie.» 

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Avez-vous grandi dans la ville de Granby?
J.-C.: Oui, puis nous avons élevé nos enfants essentiellement à Cowansville. Plus tard, nos deux plus vieux sont allés étudier à Montréal dès le cégep, et le plus jeune est lui aussi parti de la maison pour aller jouer au hockey. 

Vous avez trois garçons. Quel âge ont-ils?
J.-C.: Jean-Maxime a 27 ans, Pier-Gabriel, 26 ans, et Charles-Olivier, 24 ans.

Le public connaît davantage Pier-Gabriel puisqu’il est comédien...
J.-C.: Oui. Pier-Gabriel et Charles-Olivier habitent ensemble. Mais, Marie-Manon et moi, nous avons récemment acheté un duplex sur Le Plateau-Mont-Royal pour le transformer en triplex pour que chacun des garçons y ait son propre espace. 

Dans quel domaine Jean-Maxime et Charles-Olivier travaillent-ils?
J.-C.: Jean-Maxime est un tatoueur de renom et aussi un grapheur; il réalise des murales, notamment pour des particuliers. Charles-Olivier est gestionnaire de communautés dans le domaine des médias sociaux. Pier-Gabriel a recommencé à prendre des contrats de mannequinat, puisque les tournages de deux séries lourdes, où il tenait un rôle principal, ont été annulés en raison de la covid. Il y a toujours beaucoup d’amour et de respect. C’est le fun de voir aller nos garçons.
M.-M.: Nos fils sont très, très proches. Jean-Charles et moi, nous avons perdu notre fils aîné; je pense que cela a fait que nos autres fils se sont tenu la main.

À quel âge votre fils est-il décédé?
J.-C.: Marc-Étienne avait sept ans. C’était en 1998, à la suite d’une opération au cœur.

Souffrait-il d’une malformation cardiaque?
J.-C.: Oui, de naissance. Nous savions qu’il devait un jour ou l’autre être opéré. L’opération s’est bien déroulée. Mais, au réveil, il a fait une chute de pression. Un combat qui a duré plusieurs heures s’est amorcé, mais, malheureusement, il n’a pas survécu. Marc-Étienne avait quatre mois lorsque j’ai rencontré Manon. Il est né un peu sans père, je dirais. Son papa ne le reconnaissait pas. Moi, je suis tombé en amour avec le garçon avant de tomber en amour avec sa maman. Parce qu’il m’est arrivé la même chose, je n’ai pas eu de père.

Que s’est-il passé?
J.-C.: Ma mère s’est battue avec mon père, au sens figuré, pour avoir le droit de me garder, pour ne pas devoir se faire avorter, pour avoir le droit de me donner la vie. Ça m’a occasionné plusieurs problèmes psychologiques au cours de ma jeunesse. Il a fallu que je comprenne que je n’étais pas un imposteur, que j’avais le droit de respirer. Ce qui m’est arrivé de nouveau, d’ailleurs, au début de ma carrière d’anima- teur et de commentateur. C’est une carrière que j’embrasse et que j’adore. Mais, au début, je souffrais, encore une fois, du syndrome de l’imposteur. 

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Votre père ne voulait pas d’enfant?
J.-C.:
En effet. Il s’agissait d’un notable déjà marié et père de famille. J’ai été conçu pendant la crise d’Octobre. Ce contexte et le fait de ne pas avoir de père ont forgé l’homme que je suis, j’en suis convaincu.

Qu’est-ce que la crise d’Octobre a forgé chez vous?
J.-C.:
Mon caractère de battant, de nationaliste convaincu, de militant, d’autonomiste. Je me suis toujours débrouillé seul et je n’ai jamais manqué de rien. Je me suis toujours dit: «On est assez pauvres, on n’a pas les moyens de se priver.» C’était mon leitmotiv.

Votre père, l’avez-vous un jour vu ou revu?
J.-C.: Je l’ai revu un jour. Je l’ai même interviewé, en tant que jeune journaliste, sans savoir que c’était mon père.
 

Photo : Patrick Seguin
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Vous évoquez votre syndrome de l’imposteur, mais, n’avez-vous pas débuté à la radio communautaire à 15 ans?
J.-C.: Oui, en fait, j’ai commencé à la radio étudiante à 14 ans. Trois ans plus tard, j’ai eu mon premier contrat professionnel, dans le domaine sportif, dans une radio de Granby. 

Vous auriez pu à votre tour devenir un père absent, pour vos enfants, d’une façon ou d’une autre. Comment expliquez-vous que vous ne le soyez pas devenu?
J.-C.: J’étais et je suis trop heureux pour devenir un père problématique, probablement. Au début, je voyais marcher Marie-Manon dans les rues de Granby avec son bébé. Quelqu’un m’a raconté son histoire. Je vous le dis bien franchement: mon premier élan a été vers l’enfant. Je disais à Marie-Manon: «Tu es très jeune pour te retrouver mère d’une famille monoparentale. Va voir des spectacles, fais les sorties que tu désires, moi, je vais garder le petit.» Nous avions fréquenté la même école primaire, nous avions fait partie de la même fanfare, mais jusque-là nous ne nous étions jamais parlé. 

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Marie-Manon, avez-vous par la suite revu le pèrede Marc-Étienne?
M.-M.: Oui. Quand Marc-Étienne a eu cinq ans, son père a voulu revenir dans sa vie. Jean-Charles et moi, nous n’avions pas dit à Marc-Étienne que Jean-Charles n’était pas son père. Nous le lui avons appris à ce moment-là.
J.-C.: J’ai pensé que Marc-Étienne avait le droit de le savoir, d’autant plus qu’il faisait preuve d’une grande sagesse. Il était aussi un battant. J’imagine que c’est le cas de bien des enfants qui ne sont pas censés venir au monde... Il a parlé à son père au téléphone. Celui-ci a demandé à le voir. Marc- Étienne lui a répondu: «Non, je suis bien avec ma famille, et mon papa, c’est Jean-Charles.» Son père l’a, par contre, revu une dernière fois à l’hôpital Sainte-Justine, alors que Marc-Étienne venait de décéder. 

Sur une note plus joyeuse, avez-vous l’intention de célébrer vos 30 ans d’amour?
J.-C.: Nous avions prévu de nous marier pour l’occasion. Nous verrons si nous sommes capables d’organiser une fête sans masques. Sinon, ce sera un bal masqué.
J.-C.: C’est peut-être encore dans les plans, mais dans les faits, nous sommes partis dans d’autres sentiers. Nous en sommes à refaire un bâtiment sur le terrain, qui a abrité mon studio de télé au printemps. Pendant le confinement, j’ai animé 60 émissions de JiC à partir de ce studio. Comme nous aimons beaucoup recevoir, nous l’agrandissons et nous l’aménageons en maison pour nos invités; mais c’est ma catastrophe de cet été. 

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Que voulez-vous dire?
J.-C.:
Au départ, il s’agissait d’une toute petite annexe que nous avions décidé de transformer en maison d’invités. J’ai fait confiance à quelqu’un de ma famille pour les travaux. Malheureusement, ils ont dû être refaits, avec des gens qualifiés. Je l’ai vécu comme un drame. Ce fut un été difficile à cause d’un chantier qui a mal tourné sur fond de saga familiale. Ça m’a fait de la peine. 

Avez-vous pu tout de même vous reposer un peu?
J.-C.:
Non. Je me donne beaucoup dans mon travail. Après mes saisons de 40 semaines de travail, je suis tout le temps brûlé. Ce qui fait que l’été, j’ai besoin de décrocher. Je m’étais dit que j’allais prendre 4 des 10 semaines de pause pour la transformation de l’annexe et profiter des 6 autres pour me reposer et recevoir des gens. Mais j’ai finalement été très affairé. Je mets la main à la pâte, tout comme mon fils Charles-Olivier. J’ai perdu 40 lb depuis mars.
 

Photo : Patrick Seguin
Photo : Patrick Seguin

 

Cette perte de poids résulte-t-elle de ce travail manuel?
J.-C.:
Notamment. J’ai commencé par nettoyer mon bois; mon terrain s’étend sur trois arpents et demi. Chaque hiver fait des victimes parmi les arbres, que j’ai recyclés en paillis: un travail qui m’a fait tellement de bien, tant physiquement que mentalement. Puis il y a eu les travaux. J’ai eu l’aide de deux de mes gars. Le fait de ne pas aller au restaurant pendant trois mois, ça a aussi joué; c’est une diète en soi! Nous avons aussi l’habitude de bien nous alimenter à la maison, grâce à Marie-Manon. J’aimerais perdre 25 à 30 lb de plus. Il y avait longtemps que je ne m’étais pas si bien senti! J’ai beaucoup plus d’énergie. Si je n’avais pas perdu mes 40 livres en trop avant la catastrophe dont je parlais, je n’aurais pas survécu aux émotions qu’elle m’a fait vivre. J’ai eu 49 ans le 7 août.      

Les gagnants de la Soirée Artis seront annoncés à Sucré salé. Vous avez une toute première nomination, dans la catégorie Animateur-animatrice d’émissions de sport. Comment l’avez-vous accueillie?
J.-C.:
J’ai été vraiment surpris. Je sais qu’en tant qu’animateur de radio, j’ai marqué quelques générations, que j’ai rassemblé des familles, souvent des pères avec leurs fils; je me base sur les témoignages que j’ai reçus pour dire ça. La télé, c’est un autre média. J’ignore si je vais réussir à y laisser une marque indélébile, comme je crois avoir réussi à le faire à la radio. Je trouve que cette nomination survient très rapidement. 

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Au bout d’un an, un an et demi?
J.-C.:
Oui. JiC a débuté à TVA Sports en janvier 2019. En plus, la saison 2019-2020 a été abruptement interrompue à cause de la covid. Donc, on parle d’environ 200 émissions diffusées sur une chaîne spécialisée. Une fois la surprise passée, je n’ai pas le choix d’ouvrir les bras et de considérer cette nomination comme un cadeau, car c’en est un! Je ne l’oublierai jamais. La meilleure façon de continuer mon fabuleux destin, c’est de ne jamais bafouer le public. De ne jamais perdre de vue que nous sommes d’abord et avant tout au service du public. 

Cet amour du public doit aussi vous aider à vous accorder le droit de vivre.
J.-C.: Oui. C’est un cadeau, une tape dans le dos. Et tout ça vient avec une responsabilité: celle de poursuivre sur cette lancée et d’en donner encore plus. 

Quand reprenez-vous l’animation de JiC?
J.-C.: Je n’ai pas encore la date, mais ce sera à l’automne.

Ne manquez pas Jean-Charles Lajoie dans l’émission de Benoit Dutrizac tous les jours entre 10 h 30 et 13 h, à QUB radio, ou écoutez-le en balado sur le site qub.radio.

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