Un an après la mort de Jean Pagé, sa fille Isabelle se confie sur son deuil

François Hamel

2020-12-12T15:00:00Z

L’animateur et journaliste sportif Jean Pagé est décédé le 9 décembre 2019. Un an après son départ, sa fille Isabelle parle de lui avec tristesse, mais aussi avec une grande tendresse. Très proche de son père, elle a choisi de poursuivre sa mission en s’engageant dans l’organisme Procure, qui offre du soutien aux hommes ayant reçu un diagnostic de cancer de la prostate.

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Comment avez-vous vécu l’année écoulée, la première sans votre père?
Nous, sa famille, nous vivons encore l’étape des premiers anniversaires, des premières fêtes sans sa présence. Ce n’est pas toujours facile. J’ai eu des hauts et des bas. Parfois, je me disais: «Arrête, reviens-en!» Mais je pense qu’il faut accepter de traverser le deuil, se donner la possibilité de vivre ce qu’on a à vivre dans de telles circonstances. À mon avis, c’est ce qui fait qu’on le vit bien et qu’on passe un jour au travers. Il y a quand même un grand vide. J’imagine qu’avec le temps, ça va s’estomper. Ça fera moins mal, mais le vide sera toujours là.

On dit souvent qu’il y a différents stades dans un deuil. L’avez-vous expérimenté jusqu’à présent?

Oui. Le 12 février, c’est mon anniversaire, et je dois avouer que ce jour-là a été très pénible, parce que je n’ai pas reçu son appel. Il se faisait toujours une joie de m’appeler le premier, le matin, tôt. Ah, ça, ça m’a vraiment manqué! Nous nous parlions au téléphone tous les jours. Souvent, quand les enfants font quelque chose de drôle ou de mignon, je pense à lui et je lui dis: «Là, tu es en train de rire, n’est-ce pas?» Sérieusement, je me passe souvent cette réflexion-là parce que papa aimait beaucoup rire, comme de toutes les anecdotes reliées aux enfants. Pendant ces moments-là, je l’entends rire.

Il a été relativement conscient presque jusqu’à la fin, n’est-ce pas?
Oui. Si je pense au dernier week-end, il éprouvait certaines difficultés sur le plan de ses fonctions vitales, mais on voyait que sa tête était encore vraiment toute là. Jusqu’à ce que survienne une certaine perte de conscience... À un moment donné, il est entré dans un semi- coma et son départ est survenu assez vite après. Nous, ses proches, nous l’avons veillé jusqu’à la fin. Il était à sa maison, à Morin-Heights. Là-bas, il avait des soins en permanence, une équipe autour de nous pour s’occuper de lui.

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Votre père a combattu le cancer de la prostate pour la première fois il y a 25 ans. Il s’est d’ailleurs impliqué auprès de Procure.

Oui, cet organisme à but non lucratif, qui lutte contre ce cancer, a toujours fait partie de ma vie. Papa était là au tout début, lors de sa fonda - tion en 2003. Reprendre le flambeau, c’est pour moi tout à fait naturel. L’an dernier, je m’étais déjà impliquée un peu après avoir d’abord eu sa bénédiction; c’était important pour moi de l’obtenir. C’était ce qu’il voulait. Parlez-nous de votre implication. Je me suis engagée comme ambassadrice de la campagne Nœudvembre, mais aussi en tant que co-porte-parole de l’organisme Procure dans son ensemble. Plus nous en parlons, plus le nœud papillon, symbole de la campagne, sera populaire et plus ça rappellera aux hommes d’aller vérifier leur santé chez leur médecin et que Procure est aussi là pour les soutenir.

C’est possible de vivre avec le cancer de la prostate. Votre père a-t-il bénéficié jusqu’à la fin d’une certaine qualité de vie?
Oui, papa faisait tout, de la moto, du bateau. Il a arrêté de travailler deux ans avant son départ. Mais sinon, jusque-là, il avait l’énergie, la volonté, la capacité pour le faire. Au départ, il ne voulait pas parler de son cancer... Exactement, il avait honte, il était gêné. On n’en sortira pas: les hommes ont souvent moins tendance à parler de leurs émotions, à montrer leurs faiblesses. Quand un homme apprend qu’il a un cancer, qu’il est malade, le premier réflexe est souvent de le cacher, de faire semblant que ça va bien, tant que c’est possible. Je parle des hommes, mais il a sûrement bien des femmes qui ont au départ cette même attitude. Avec sa maladie, papa a appris que c’est correct d’être vulnérable, de le montrer et de le partager. Au début de Procure, il a sensibilisé les hommes un par un. Aujourd’hui, nous sommes plusieurs, tous unis pour la cause. Cette année, on parle de 25 personnalités ambassadeurs et ambassadrices de Nœudvembre. C’est beau à voir.

Quel a été le déclic pour que votre père décide de s’ouvrir sur son état?

Il y a 25 ans, je crois bien qu’il a pensé à ses enfants, qu’il était important qu’il vive cette situation-là avec nous. Il s’est assis avec nous et il a bien vu que ça ne faisait pas mal d’en parler. De plus, le cancer de la prostate est héréditaire. Moi, j’ai un frère et deux garçons. Dans la famille, il faudra être vigilants. C’est un cancer très répandu, et Procure est là pour ceux qui en ont besoin. Il y a une ligne d’écoute 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, et ça lui tenait beaucoup à cœur, à papa. Il disait: «Si, au début, tu ne veux pas en parler à ta famille, en parler à un étranger, ça casse la glace, et tu réalises que tu n’es pas seul avec cette maladie-là.»

Au cours de la dernière année, y a-t-il des souvenirs particulièrement tendres et associés à votre père qui sont remontés à la surface?

Oui, chaque fois que je fais du bateau, je pense à lui. Parce que sur un bateau, papa était si heureux et habité d’un grand sentiment de liberté! La moto signifiait aussi pour lui la liberté totale, je me suis souvent promenée à moto avec lui. Mes garçons font un peu de motocross au chalet; je les trouve cutes! Mon père trouvait aussi ma plus jeune très drôle. Elle est un peu tomboy, elle adore faire du quatre-roues. Ah, qu’il serait content de la voir aller! Les souvenirs qui me reviennent sont toujours accompagnés d’un sourire.

Vous avez quatre enfants, n’est-ce pas?
Oui, Eliot, 15 ans, Guillaume, 12 ans, Olivia, 9 ans et Maxime, 7 ans. Mon père avait une relation extraordinaire avec chacun d’entre eux. Eliot aimerait devenir joueur de football professionnel; il est passionné de sports, comme l’était papa. Parfois, il me sort des statistiques, des théories qui m’impressionnent. 

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Pour s’informer sur l’organisme ou le cancer de la prostate, ou encore pour faire un don, rendez-vous à procure.ca ou nœudvembre.ca. Du soutien est offert 7 jours sur 7, 24 heures sur 24 au 1 855 899-2873


  

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