Martine St-Clair revient sur l’événement qui a changé sa vie

Photo : Karine Lévesque / TVA p

Michèle Lemieux

2022-11-15T12:00:00Z

Martine St-Clair célèbre à la fois 40 ans de carrière dans le milieu artistique et 60 ans de vie. Cette carrière, qui a démarré de façon fulgurante, s’est maintenue au fil du temps. Quatre décennies plus tard, elle se résume à neuf albums, un million de disques vendus et 14 numéros 1 au palmarès, des chiffres éloquents qui confirment l’ampleur de ce succès. Pour marquer cette étape, la chanteuse nous offre un album intitulé Les retrouvailles qui comprend ses plus grands succès.

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Martine, vous nous offrez un album de vos plus belles chansons enregistrées live. Que contient-il?

On y trouve tous mes grands succès, de Monopolis à Il y a de l’amour dans l’air, en passant par Ce soir l’amour est dans tes yeux, On va s’aimer, L’amour est mort, Tot’aime et bien d’autres.

Rappelons dans quel contexte vous aviez lancé votre carrière...

C’était dans Starmania, alors que j’avais 17 ans. J’ai reçu mon premier Félix en 1980. J’avais été nommée révélation de l’année. Encore aujourd’hui, c’est le Félix dont je suis le plus fière, car personne n’a jamais reçu ce Félix sans même avoir fait un premier album, ce qui était mon cas. Quand j’ai entendu mon nom, je me suis demandé ce que j’avais fait... Ce soir-là, j’ai compris que mes collègues me donnaient une petite tape dans le dos. Le lendemain, c’était la folie!

Photo : / SRC
Photo : / SRC

C’est le genre d’événement qui change une vie!

Oui, et c’est grâce à Luc Plamondon. Il ne savait même pas si j’allais pouvoir relever ce défi. Il m’avait vue gagner la finale de Cégeps en spectacle. Le bruit courait que Luc était dans la salle. Je me demandais: «Qui est Luc?» J’avais interprété Le monde est stone et La serveuse automate. J’habitais alors chez mes parents, à Rosemont. Luc a appelé mon père pour lui dire qu’il voulait auditionner sa fille pour le rôle de Cristal. Comme j’étais au cégep et qu’il voulait que je poursuive mes études, mon père a refusé. Au bout du fil, Luc s’est dit que Monsieur Neault ne comprenait pas ce qui se passait! Mon père ne savait pas ce qu’était Starmania. Nous étions huit enfants à la maison, cinq filles, trois gars. Je n’ai jamais entendu mes parents dire qu’ils voulaient que je fasse carrière dans ce domaine...

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Luc a donc réussi à convaincre votre père?

Oui, il l’a rappelé pour lui dire qu’il devait me donner la chance d’auditionner. Mon père faisait toujours des conseils de famille au souper. Il a demandé l’avis de tous. Nous en avons conclu que je n’avais rien à perdre et que je n’avais qu’à passer l’audition. Je connaissais Starmania, car il y avait eu une édition en France en 1976. C’était la première version québécoise que nous allions créer. Présenter Starmania au Québec était, pour Luc et Michel Berger, le rêve d’une vie... Ils ont fait construire le théâtre Félix Leclerc pour nous. Nous attendions, mais il n’était toujours pas terminé. Comme j’avais quitté mes études, mon père se demandait dans quoi il avait embarqué sa fille... Il vivait un grand stress. 

Photo : Frederic Auclair / TVA
Photo : Frederic Auclair / TVA

La suite des choses lui a donné tort!

Oui, ç’a été la consécration. Ç’a été un grand succès. Un album a suivi: Starmania Made in Québec, et nous sommes partis en tournée. J’avais 18 ans, je ne connaissais personne dans le milieu et je devais apprendre mon métier.

Vous n’aviez jamais rêvé de cette carrière?

Non. Je regardais autour de moi, j’observais et je me demandais ce qu’était ce milieu. Il y avait des partys... Moi, j’avais un couvre-feu. Mon père était assez sévère: il fallait que je rentre à la maison. (sourire) Je travaillais fort, mais quand je revenais chez moi après un spectacle ou une tournée, il n’y avait pas de place pour la célébration. Parfois, j’aurais aimé célébrer parce que j’avais gagné un prix, par exemple. Je me rappelle être revenue d’un gala de l’ADISQ avec trois Félix. Mes parents avaient commandé du poulet, mais sans plus.

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Avez-vous remis votre choix en question?

Non, mais c’était beaucoup à gérer pour une jeune fille. J’ai eu une bonne étoile. J’ai vu des artistes qui ont débuté, jeunes, perdre pied. J’ai été chanceuse. Je n’avais pas le choix: l’inspecteur Clouseau m’attendait à la maison! (rires) Je me donne aussi du crédit, car on peut venir d’une famille droite et glisser ou venir d’une famille plus rock’n’roll et suivre son chemin. Il faut que ce métier soit une passion, sinon c’est trop dur. J’ai eu la force intérieure nécessaire pour passer au travers de plein de choses. C’est un métier qui nous transforme sans qu’on ne voie rien venir. Il faut se questionner: «Est-ce que c’est toujours moi? Est-ce que ça me ressemble?» À 32 ou 33 ans, je n’avais plus le goût de faire ce métier.

N’est-ce pas normal après tout ce temps?

Oui, mais personne ne me l’avait dit. J’avais envie de lâcher. Je suis allée voir mon père en lui disant que j’avais fait le tour du jardin. Parfois, j’ai pris du temps pour moi, car je voulais vérifier si j’aimais cette vie. Je voulais m’ennuyer du métier. Puis l’art visuel est arrivé dans ma vie. Peindre me permet de revivre la passion de mes débuts. M’enfermer dans mon atelier me fait le même effet que Starmania.

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Y a-t-il eu des passages à vide en 40 ans?

Bien sûr. Il m’est arrivé de me demander si j’avais encore ma place. Les médias ont changé. Je chantais de la pop, et cela avait moins sa place à la radio. J’ai persisté et je me suis réinventée. 

Quels sont les moments inoubliables pour vous?

Partager la scène avec de grands artistes. Quand Luc m’a demandé à nouveau de faire Cristal, mais en France. Il m’avait dit que ça durerait deux mois. J’y ai été deux ans! Paris a été une renaissance pour moi. J’ai rencontré Michel Berger, France Gall et bien d’autres. Et la magie de Paris! Découvrir cette ville, ses galeries, être habillée par les grands designers, ç’a été formidable! Rencontrer la belle gang de Marc Lavoine a donné naissance à Caribou, un album que j’adore! Les gens se sont demandé ce qui m’arrivait... Ça a dérangé un peu, mais je m’amusais. J’ai eu l’audace de changer de style, de m’améliorer, de continuer à apprendre. C’est facile de s’asseoir sur ses succès.

Photo : Karine Lévesque / TVA p
Photo : Karine Lévesque / TVA p

De quoi êtes-vous le plus fière?

De ne pas avoir oublié cette jeune fille avec toutes ses failles, sa timidité et ses peurs. J’avais peur de ne pas être à la hauteur et de décevoir. Je ne laissais pas voir cette jeune fille, mais j’en ai pris soin. Un jour que j’étais au Centre national des arts, j’ai ressenti un grand stress. Il fallait absolument que je parle à mon père avant de chanter. J’ai pris le téléphone au mur et je l’ai appelé pour lui dire que j’avais peur...

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Vous avez eu 60 ans cet été. Comment avez-vous abordé cette décennie?

J’avais tellement hâte que ça passe! J’ai dit à tout le monde autour de moi que je ne voulais pas de surprise-party, mais que j’acceptais les micro partys. (sourire) Le soir de mon anniversaire, je me suis dit qu’enfin, c’était terminé...

Est-ce que ç’a été difficile?

Non. Je suis aidante pour ma mère de 92 ans. Quel courage! Quelle force! Quel désir de rester en vie! Et moi je me plaindrais d’avoir 60 ans? Non. La vie est belle. Je crois aux valeurs humaines telles que l’empathie et la compassion. Dans notre société, ce sont des valeurs qui nous manquent...

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