Mathieu Gratton encourage Benjamin dans son désir d’autonomie
Michèle Lemieux
Comme tous les parents, Mathieu Gratton souhaite voir son fils atteindre sa pleine autonomie et développer son plein potentiel. À 20 ans, Benjamin déploie de plus en plus ses ailes, il rêve même de vivre seul, en appartement. Des désirs légitimes que portent père et fils, qui travaillent ensemble dans ce même but.
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Mathieu, vous donnez des conférences intitulées Un beau détour. Quels en sont les sujets?
Mathieu: C’est sur mon parcours de père, mais aussi sur d’autres sujets. Il y a 15 ans, si on m’avait dit que j’allais gérer une page Facebook, faire des vidéos sur une base hebdomadaire avec mon fils, donner des conférences, je ne l’aurais pas cru. Ma vie est teintée par l’autisme. De l’acceptation à aujourd’hui, nous vivons en harmonie avec Ben et le fait qu’il soit autiste. Un beau détour, c’est justement parce que j’ai transformé le négatif en positif. Ça s’est fait progressivement.
Avril est officiellement le mois de l’autisme. Est-ce satisfaisant de voir la place qu’on accorde dorénavant à cette problématique?
M.: Oui, surtout qu’elle touche près de 1,5 % de la population du Québec. Les gens sont sensibilisés à la cause, et je pense qu’on est prêts pour la prochaine étape, qui est de changer les choses au niveau gouvernemental pour que les autistes puissent être considérés à part entière. Je travaille beaucoup à changer les mentalités du marché du travail.
Dans quel sens exactement?
Je voudrais qu’il y ait plus de choix que de travailler dans les entreprises adaptées à faire du travail à la chaîne répétitif. C’est mon défi des prochaines années. Selon le potentiel de chacun, j’aimerais les voir dans l’hôtellerie, au cinéma, dans les magasins. Ils peuvent apporter leur contribution partout. Je prépare des capsules sur l’emploi, qui sortiront en mai.
Benjamin fêtera ses 21 ans, cette année...
M.: Oui. Je veux que les horizons s’ouvrent pour lui et pour les autres. Je souhaite ce qu’il veut. Je vais travailler dans le même sens que lui. Les parents d’un enfant autiste gagnent leur vie, mais aussi celle de leur enfant, même quand il est devenu adulte. Nous allons essayer de le placer dans un environnement qui lui plaît. C’est important qu’il ait des contacts avec des gens, qu’il ait des amis, des collègues de travail. On veut lui construire une vie à sa mesure et à la mesure de ses désirs.
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Cette année, Dany Bédar a accepté de chanter le mois de l’autisme avec Une pause de toi. Comment avez-vous accueilli cette chanson?
M.: La chanson m’a jeté à terre! En cinq minutes, Dany acceptait de collaborer. Il s’est intéressé à la cause. Quand il m’a montré le texte sur le répit, j’ai trouvé qu’il avait choisi les bons mots pour dire les choses. La chanson peut s’appliquer à tous les parents qui ont besoin de faire une pause de leur enfant. Dany a eu la générosité de nous inviter dans son studio. Nous avons gardé le contact.
Benjamin: Sa chanson, je l’aime! C’était trop cool. J’ai rencontré son fils, Kalel. Il a sept ans. Nous avons eu une belle connexion avec les jeux vidéos et les jouets.
M.: C’était une rencontre authentique et humaine. Ils ont 13 ans de différence, mais Benjamin s’entend bien aussi avec les plus jeunes que lui.
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Vous êtes aussi devenu porte-parole d’une fondation. À quoi sert-elle?
M.: De toute ma carrière, je n’avais jamais été porte-parole d’une fondation. La Fondation Benny&Co. est extraordinaire! Elle s’occupe des familles différentes. La différence pour moi, c’est l’autisme, mais il y a aussi la déficience intellectuelle, la trisomie, etc. Cette fondation offre du répit aux jeunes qui ont ces profils. Chaque dollar reçu paye les répits, sans frais d’administration. On enverra des jeunes dans un camp cet été, partout au Québec. Ceux qui reçoivent du répit ne sont pas les plus privilégiés de la vie. Aider mon prochain me stimule à continuer.
D’où Le monde de Benjamin, qui connaît une belle popularité.
M: Les centaines de messages que nous recevons sur la page Facebook me permettent de confirmer qu’on a tous besoin de se sentir unis. Benjamin est un vecteur d’optimisme. Ça me réconforte de voir cette communauté qui essaie de s’entraider.
Vouloir le meilleur pour votre fils depuis 20 ans vous rend-il fier?
M.: Oui, mais je suis ambitieux. Je vois plus loin. Je veux développer encore plus son autonomie. Il a du potentiel. Je le vois très bien avoir une série où il parle de lui, de ses passions, sans parler de son autisme. Ça fait aussi partie de mes ambitions. Benjamin rêve de vivre en appartement.
B.: Je veux vivre dans un condo de luxe!
Ça vous touche de voir votre fils rêver?
M.: Oui, et on lui permet de le faire. Il a sa communauté, ses amis. Il se promène toute la journée. Nous le suivons sur GPS, mais il est autonome. Plus on donne de liberté à quelqu’un, plus il en veut. Plus il en veut, plus nous faisons en sorte qu’il en ait. C’est en se promenant dans les souterrains et le métro de Montréal que Benjamin est tombé sur des condos et des hôtels de luxe. On s’entend: ce n’est pas dans nos budgets pour l’instant! Le destin de ces personnes, c’est souvent de travailler au salaire minimum toute leur vie et de vivre sous le seuil de la pauvreté. Si on peut lui éviter ça, ce sera un beau miracle. Ça prendrait à Benjamin un beau contrat de porte-parole pour qu’il puisse réaliser ses rêves...
Vous n’avez pas, semble-t-il, renoncé à votre projet de famille d’accueil?
M.: En effet. Pendant la première année comme famille d’accueil, nous avons appris beaucoup de choses. Nous savons plus à quoi nous attendre, quel genre de personne pourrait s’harmoniser à notre rythme de vie. Nous souhaitons continuer. Nous sommes actifs. Il faudrait que le jeune ne soit pas déstabilisé par notre rythme. Nous nous considérons comme une famille qui sera en mesure d’aider un jeune qui rêve de s’épanouir plutôt qu’une personne qui a besoin de soins.
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La Grande Collecte
Pendant tout le mois d’avril, la Fondation Benny & Co. organise une collecte de dons au bénéfice des organismes pour accompagner les jeunes autistes: le Camp Papillon, le Camp Massawippi et la Société franco-ontarienne de l’autisme. Grâce à ces dons, des jeunes pourront participer à un camp d’été spécialisé où s’amuser, tout en donnant un répit à leurs parents.
► Pour en savoir plus, rendez-vous à benny-co.com/fondation.
► Pour s’informer sur les conférences de Mathieu, on visite le ppscanada.com. Son fils et lui continuent d’être actifs sur leur page Facebook Le monde de Benjamin. On suit les projets de Mathieu sur ses réseaux sociaux et son site mathieugratton.com.
