Jocelyne Cazin parle ouvertement de sexualité dans son autobiographie audacieuse

Julien Faugère

François Hamel

2020-10-04T14:00:00Z

Dans son autobiographie intitulée Ma véritable identité, Jocelyne Cazin s’ouvre comme jamais. Une fois de plus, la communicatrice cherche à faire œuvre utile, mais cette fois-ci en abordant aussi sa vie privée. À l’approche de ses 70 ans, elle s’est choisie.

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Jocelyne, pourquoi avez-vous choisi de lancer votre autobiographie maintenant?
Peut-être devrions-nous d’abord remonter dans le temps. En 2011, on m’a sollicitée pour écrire mon autobiographie; j’avais 60 ans et j’avais refusé. Je n’étais pas prête à faire part aux gens de ma vie privée. Pendant une vingtaine d’années, je n’ai pas révélé, entre autres, mon homosexualité. Probablement en raison du constat que je fais maintenant, soit que je ne suis pas homosexuelle, mais plutôt bisexuelle. Mais en même temps, pourquoi se cataloguer?

Mais vous avez tout de même écrit J’ose déranger, qui a été publié en octobre 2014.
Oui, parce que mes éditrices avaient récidivé. Alors, je leur avais envoyé les textes de mes conférences, et nous avions décidé, d’un commun accord, de publier un livre basé sur celles-ci. Puis ils ont recommencé à me solliciter pour une biographie il y a deux ans. À ce moment-là, j’ai recommencé à écrire, mais sans penser qu’il y aurait, au final, une autobiographie. Ç’a été comme une forme de thérapie pour moi.

Écriviez-vous déjà à propos de tout?
En fait, j’ai commencé à écrire à propos de ma vie sexuelle. Je n’étais pas encore prête à publier le tout, mais j’étais au moins prête à jeter le tout sur papier pour moi-même. Mon éditrice, Nadine Lauzon, m’a finalement convaincue de le publier, et nous avons décidé d’un plan ensemble. Je ne voulais pas présenter les choses dans un ordre chronologique; nous nous sommes aussi mises d’accord là-dessus. Je l’ai écrit comme je l’ai ressenti et j’ai trouvé la raison d’être de ce livre-là.

Quelle est-elle?
Je veux aider un tant soit peu des femmes qui ont vécu le cœur serré toute leur vie, et même des hommes. Des hommes et des femmes qui n’ont jamais été capables d’être eux-mêmes, d’être vrais et de vivre leur véritable identité. C’est ça, mon livre: je parle de ma véritable identité, que je n’ai pas pu assumer pendant toutes ces années. Moi, j’aime être avec une personne qui me plaît, mais je préfère être avec un homme.

Pourquoi?
Un peu à cause de la pression sociale — je ne peux pas le nier. Mais aussi parce que je suis bien avec des hommes. Prenez, cette semaine, j’ai joué au golf avec trois gars. J’étais assez bien! L’année 2020 et la covid ont donné l’occasion à beaucoup de gens de faire de l’introspection. Personnellement, à l’aube de mes 70 ans, j’ai encore besoin d’être aimée, mais pas par tout le monde. J’ai appris à choisir mes batailles. Un processus que j’ai entamé surtout à la suite de mon départ de TVA et de LCN en 2008.

Vous vous êtes choisie?
Je suis en train de me choisir. Jusqu’à cette année encore, des amis proches ignoraient de grands pans de ma vie; soit le fait que j’ai été avec des femmes pendant une vingtaine d’années. C’est dû au fait que, depuis les années 2000, j’ai été avec des hommes. Donc, au cours des derniers mois, avant que mon livre sorte, j’ai réuni des amis par petits groupes et je leur en ai parlé. Certains ont été surpris, alors que d’autres m’ont affirmé qu’ils s’en doutaient. 

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Votre ouvrage était-il déjà presque terminé avant le récent confinement?
Pas vraiment. Je suis passée de 80 pages à 208 pages depuis le début de la pandémie. Par ailleurs, avec la covid-19, j’ai commencé à marcher, ce que je ne faisais pas auparavant. J’ai beaucoup marché, tous les jours, avec des amis qui habitent près de chez moi. J’ai perdu du poids.

Vous avez déjà confié que vous aviez consulté un psychologue. Le faites-vous encore?
Plus maintenant. Ma dernière consultation a été virtuelle, parce que je me trouvais en Floride, et elle remonte à deux ans.

Est-ce trop indiscret de demander le pourquoi de cette dernière consultation?
Non. C’était en vue de ce livre. Je voulais savoir où aller avec tout ça. Je lui ai avant tout parlé de mes angoisses. Ça aussi, les gens l’ignorent, mais je suis une personne naturellement angoissée.

Parce que ce n’est pas ce que vous dégagez...
En effet, je dégage plutôt la joie de vivre, l’imbécile heureuse. (sourire)

Et aussi parfois «le pitbull»!
(Rires) Et pourtant, j’ai adopté Charlie en avril, l’an dernier. C’est un tout petit caniche, qui va avoir bientôt deux ans. À la blague, je disais à mes amis: «Je n’arrête pas de me chercher un deux-pattes, je vais éventuellement me trouver un quatre-pattes d’ici mes 70 ans.» Ce qu’il y a de paradoxal chez moi, c’est qu’il y a la Jocelyne Cazin de la télévision, qui a l’air d’une pitbull et qui a l’air d’être très sceptique face à tout, et il y a l’autre Jocelyne, qui est toute petite, qui a peur et qui se sent rejetée.

Comment expliquez-vous ce sentiment de rejet?
Le premier rejet, je l’ai vécu en entrant à l’école lorsque la maîtresse m’a notamment traitée de «maudite Française», en raison de mon accent. (Les parents de Jocelyne Cazin sont tous les deux nés en France et elle est enfant unique.) Par la suite, j’ai subi le rejet des autres enfants de mon entourage, pour la même raison. Plus tard, ce fut au travail: on me disait qu’il n’y aurait jamais de femme journaliste œuvrant dans le secteur de l’information. Puis il y a eu celui d’une amie de 20 ans parce que, m’a-t-elle dit, j’étais trop intense. C’est vrai que je le suis, et j’essaie de m’en guérir. Je suis dans le processus de guérison. Parce que la pitbull est là aussi parfois dans la vie privée.

N’avez-vous pas aussi, un jour, entendu votre mère dire qu’elle aurait préféré avoir un garçon?
Oui, quand j’étais adolescente.

Avez-vous reparlé de votre identité sexuelle avec votre père, avant sa mort?
Mon père est décédé en 1980. Après avoir appris qu’il souffrait d’un cancer du pancréas, il m’a dit qu’il me pardonnait et qu’il m’aimait. Mais je ne me souviens pas d’être entrée dans des détails du genre avec lui.

Mais pourquoi dites-vous qu’il vous «pardonnait»?
Il était un homme de sa génération. Mais, effectivement, je n’avais pas à me faire pardonner de vivre avec une femme, par exemple. Mais c’était une façon de penser à l’époque.

Pour l’avenir, côté relations amoureuses, êtes-vous ouverte à tout?
J’attends de voir qui va se présenter à moi. Il faut aussi mentionner que vous avez été mariée. Oui, j’ai été huit ans avec Robert; on a été mariés trois ans. S’agit-il de votre plus longue relation à ce jour? En effet, sinon mes autres histoires d’amour ont duré entre trois et cinq ans.
 

Son autobiographie Ma véritable identité, publiée chez Libre Expression, vient tout juste de sortir.

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