Joanie Gonthier confie comment elle a pu vaincre ses démons et se reconstruire

Photo : Julien Faugere

Samuel Pradier

2021-07-26T11:00:00Z

Derrière le sourire espiègle et l’humour spontané de l’ancienne chroniqueuse météo de Salut Bonjour se cachait un drame intime. Problèmes alimentaires, dépression et alcoolisme ont rythmé son quotidien pendant plus de 10 ans jusqu’à ce qu’elle touche le fond. Joanie Gonthier revient sur son parcours de guérison pour inspirer et donner envie de s’en sortir.

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Joanie, tu racontes dans ton livre tout ton parcours en évoquant tes troubles alimentaires, ton alcoolisme et ta dépression. Quel a été le déclic pour que tu changes?
Ça faisait des années que j’essayais de m’en sortir. Chaque 1er janvier était le début de ma nouvelle vie, mais ça ne fonctionnait jamais. J’utilisais aussi ma date d’anniversaire ou des dates de fêtes, mais j’échouais chaque fois. Ça m’a pris au moins 12 ans avant d’y arriver. J’étais très consciente de mes problèmes, mais je ne voulais surtout pas que ça me nuise dans ma carrière. À la fin de 2018, j’ai vraiment touché le fond. J’avais quitté Salut Bonjour et j’étais toute seule chez moi. L’élément déclencheur a été l’arrivée d’idées suicidaires. Je m’étais mis tout le monde à dos. Je ne voulais voir personne; juste être seule dans mes affaires. Je ne parlais plus à mes parents ni à mes sœurs. J’étais juste avec mon amoureux, qui a toujours été présent. C’est à ce moment-là que j’ai eu une dernière once de courage pour essayer de me guérir. 

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Faut-il aller jusqu’à ce stade pour s’en sortir?
Je ne pense pas. Mais quand tu flirtes d’aussi près avec la mort, ça fait peur. Un déclic se fait, et tu penses à ceux qui t’aiment. Je pensais à mon amoureux, à mes deux petits chiens, à ma famille. L’image qui m’est venue à l’esprit est celle de la petite fille que j’étais, qui voulait avoir du plaisir, et qui était pleine d’énergie et de créativité. Je me suis dit que je l’avais laissée tomber, et ça a provoqué toutes sortes de prises de conscience. J’ai décidé de faire tout ce qui me faisait peur: manger, accepter la prise de poids qui venait avec et réparer mon corps de l’intérieur. 

J’imagine que ce doit être douloureux de vivre ce genre d’émotion, non?
C’est extrêmement douloureux, et c’est même la partie la plus difficile. Se sortir de 12 ans de troubles alimentaires, ça ne se fait pas tout seul. Mes organes ont été touchés. Encore à ce jour, ma vésicule biliaire est problématique, j’ai des problèmes de digestion et de ballonnements. Mon système lymphatique est au ralenti. Mes hormones étaient déséquilibrées. Et il y a toute l’anxiété qui t’habite juste à l’idée de faire les choses qui te font peur, comme manger suffisamment trois repas par jour. Le corps a besoin de retrouver une certaine confiance et, au bout d’un certain temps, on atteint son poids santé. Je suis encore dans ce processus-là. 

Photo : Julien Faugere
Photo : Julien Faugere

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Comment as-tu été aidée?
Je n’ai vu personne. J’avais quitté ma job, j’étais à la maison, le téléphone ne sonnait pas, ce qui était finalement une bonne chose. Je n’avais aucun revenu et je ne savais pas ce qui allait m’arriver dans l’avenir. Dépenser une centaine de dollars par semaine pour aller voir un thérapeute était beaucoup trop. Je savais aussi que personne ne pouvait faire les choses à ma place: manger, éviter de me faire vomir et arrêter de boire de l’alcool. Avec le recul, je ne sais même pas comment j’ai fait. J’ai l’impression que c’était mon instinct de survie qui me guidait. J’avais déjà suivi des thérapies par le passé et je savais que tout devait partir de moi avant tout.

As-tu eu des rechutes pendant le processus?
Non, et je sais qu’il n’y en aura pas. J’ai une tête de cochon. Pendant 12 ans, j’ai décidé que j’étais malade, que je buvais et que j’étais boulimique. Aujourd’hui, je ne veux plus retourner là. Ça fait maintenant plus de deux ans que je goûte à ce qu’est la vie quand je nourris mon corps, quand j’ai de l’énergie, sans avoir la dépression de l’alcool... Je suis une femme forte. En général, quand je veux quelque chose, je fais tout pour y arriver.

Pour guérir, on dit souvent qu’il faut retourner à la source du problème. Es-tu allée chercher pourquoi tu étais tombée là-dedans?
Par le passé, j’avais consulté une psychologue qui m’avait parlé de la jeune Joanie. Ma sœur jumelle est médecin, elle a toujours été bonne à l’école. J’ai une famille extraordinaire, et comme tous les parents, les nôtres nous poussaient à nous accomplir. Moi, je n’étais pas bonne en maths ni en science. Je voulais être actrice et artiste. À un moment donné, j’ai eu peur d’être l’enfant poche de la famille. J’ai senti que j’étais inadéquate. C’était un sentiment très personnel que j’ai développé dans ma tête. Je me suis dit que, si je voulais réussir dans la vie, il fallait que je change, que je devienne hyper studieuse, que je sois belle, mince et que je fasse telle ou telle chose. Je me suis déconnectée de qui j’étais pour devenir une fille parfaite. Dans ma guérison, je suis souvent revenue à cette idée.

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Photo : Julien Faugere
Photo : Julien Faugere



Ton amoureux, Yannick, est resté auprès de toi durant toute cette période. Qu’est-ce qui l’a fait tenir?
Malgré ma déprime et ma détresse, on a toujours su trouver des moments de couple magnifiques, même si ça n’arrivait pas souvent. Mon chum me fait rire, et quand il me regarde, je me trouve belle à travers ses yeux. Quand il me prend dans ses bras, je ressens tout son amour pour moi. Ça va faire 11 ans qu’on est ensemble. Au début de notre relation, je faisais mon gros possible pour ne pas perdre le contrôle devant lui. Mais plus tard, la maladie a pris le contrôle de mon corps, et je me moquais de qui était là. Je mangeais beaucoup, j’allais ensuite me faire vomir et je buvais ma troisième bouteille de vin devant lui. Il a compris qu’il ne pouvait rien faire physiquement pour m’aider, qu’il pouvait juste choisir de rester là. Je lui en serai éternellement reconnaissante. 

Qu’est-ce que la sortie de ton livre a changé pour toi?
J’avais peur de présenter ce livre, parce que je me demandais qui ça allait intéresser. Mais son succès me permet de voir que les problématiques dont je parle rejoignent bien du monde. Il n’y a pas une journée où je ne reçois pas un message de filles, et de plus en plus de gars, qui sont en détresse par rapport à la bouffe, aux troubles alimentaires, à l’alcool ou à la drogue. Partager mon histoire leur a permis de s’apercevoir qu’ils ne sont pas seuls à vivre des choses difficiles.

Plus de deux ans plus tard, est-ce encore un travail au quotidien?
Ma réponse est non. Dans le processus de guérison, j’ai décidé d’y aller à fond dans l’écoute de mon corps et de ses signaux. Quand tu sors de l’anorexie, tant que tu ne réponds pas à ta faim animale, tu vas penser à la nourriture. Moi, j’ai accepté de prendre du poids pour ne plus penser à la nourriture. Ça peut être inconfortable, mais je sais qu’à un moment donné, mon corps va retrouver un équilibre. Ça prend du temps, mais il faut juste être plein de compassion pour soi-même. Je ne veux plus lutter contre mon corps. Je me suis tellement fait de mal. Je viens d’avoir 33 ans et j’ai mes règles depuis seulement un an. Ça faisait 10 ans que je n’avais pas de menstruations à cause de tout ça.

Est-ce que ton ambition a changé depuis que tu vas mieux?
Je veux toujours être actrice, c’est ma passion première, et j’adore aussi l’animation. Mais je veux maintenant vivre pour moi, je veux faire des choses qui me passionnent. Je ne dois rien à personne, je veux juste être bien. Mon chum est un gars simple et il me le rappelle souvent. Je veux juste me lever le matin et être excitée par ma journée parce que je sais que je vais faire des choses que j’aime.

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Joanie Gonthier fait partie de l’équipe d’On est tous debout, du lundi au vendredi, dès 5h30, à Rouge, avec Joël Legendre et Guillaume Pineault.
Son livre
J’ai menti est toujours disponible en librairie.


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