À l’aube de la soixantaine, Christian Bégin n’arrive pas à ralentir

Daniel Daignault

2022-08-14T11:45:00Z

C’est une carrière pour le moins fructueuse et diversifiée que mène Christian Bégin depuis maintenant 38 ans. Animateur, acteur, auteur, il porte plusieurs chapeaux et, comme il le dit lui-même, il n’aura pas assez d’une vie pour réaliser tous les projets qu’il a en tête. À travers ce flot d’occupations, Christian parvient à faire le vide et à relaxer lorsqu’il se rend à sa maison dans la région de Kamouraska, où nous nous sommes rendus pour le rencontrer.

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Entre les émissions que tu animes et celles dans lesquelles tu joues, j’imagine que ta maison de Kamouraska te permet de faire le vide...

Absolument, et c’est l’une des raisons pour lesquelles je l’ai achetée il y a 13 ans. Je suis toujours à m’inquiéter, dans ma tête et dans ma vie, alors juste le fait de prendre la route et m’en aller vers ma maison, ça me permet de décompresser. C’est une façon, disons, de diminuer l’intensité de mes activités. 

Comment en es-tu venu à l’acheter?

J’ai découvert Kamouraska il y a très longtemps, quand mon fils était plus petit. On allait faire du camping en Gaspésie et, un jour, on s’est arrêtés dans un camping situé sur le bord du fleuve dans la région de Kamouraska. On est vraiment tombés en amour avec la place et on y est retournés pendant quelques années. Puis, il y a eu un gros hiatus pendant lequel je n’y suis pas retourné. Lors de la deuxième année de Curieux Bégin, on a fait une émission là-bas, et je me suis lié d’amitié avec des gens qui sont devenus très importants dans ma vie. À la fin de ce tournage, vraiment charmé par l’endroit, périmètre d’une cinquantaine de kilomètres. Nos légumes viennent tous de maraîchers et maraîchères du coin, nos viandes aussi. Cela dit, c’est vraiment Marie-Fleur qui porte ce projet-là à bout de bras, au jour le jour. Elle a vraiment changé de vie, elle a tout vendu à Montréal, elle a déménagé avec son chum et ses enfants, elle a vraiment fait le grand move. Moi, je participe à distance à l’administration, à la philosophie des lieux et à certains partenariats avec je leur avais dit que si jamais l’un d’entre eux trouvait une maison à vendre, ça pourrait m’intéresser et qu’ils seraient gentils de m’en parler. Je leur ai dit ça sans trop y croire. Je pensais que ça n’arriverait jamais. Mais quelques mois plus tard, l’une de ces personnes m’a téléphoné pour me dire qu’il y avait une maison à vendre à Saint-Germain. Je me suis rendu là-bas et j’ai eu un coup de cœur instantané pour la maison, qui ne laissait pas présager tout ce qu’elle pouvait avoir comme potentiel. J’ai su aussitôt que j’étais chez moi. C’est comme ça que ça s’est passé: sur un coup de tête. J’ai acheté la maison en 24 heures. Depuis ce temps-là, je n’y suis pas aussi souvent que je le voudrais. 

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Et tu n’as pas mis de temps à t’impliquer auprès de tes concitoyens...

Les premières années, quand j’ai habité à Saint-Germain, j’ai été conseiller municipal. Ç’a été une façon pour moi de m’intégrer à la communauté, d’observer, de regarder ce qu’il se passait, et aussi de faire comprendre aux gens que je n’étais pas là en touriste, mais pour m’y établir. Après ces trois ans, j’avais trop de travail, alors j’ai démissionné de mon poste, mais je continue à être impliqué dans le comité culturel. J’ai toujours été un bon ambassadeur et un citoyen qui avait le souci de participer à l’activité de sa communauté.

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Et puis, en mars 2021, tu as décidé de devenir propriétaire d’une épicerie?

Oui, avec Marie-Fleur Saint-Pierre (une cheffe renommée), on a acheté Le Jardin du bedeau, qui est l’épicerie du village de Kamouraska et qui existe depuis plus de 15 ans. On a gardé la même mission, qui était de promouvoir les produits locaux, et on a bonifié l’offre, on a établi d’autres partenariats; on s’est créé l’épicerie dont on avait envie.

Quel bilan fais-tu de cette expérience après un an?

Que c’est une magnifique aventure et que ça répond aussi à un besoin, parce qu’on est la première administration à avoir gardé l’épicerie ouverte à l’année. Il est très rare dans Kamouraska d’avoir un commerce ouvert à l’année, sept jours sur sept, et on s’est rendu compte que ça répondait à un besoin de la communauté. C’est une expérience qui est très concluante pour moi, c’est comme la poursuite de ce que je sème depuis 15 ans avec Curieux Bégin, c’est-à-dire de soutenir des productrices et producteurs locaux et de parler de qui nous sommes à travers ce que nous produisons et mangeons. Je dirais qu’à environ 80 %, les produits que nous avons à l’épice- rie sont québécois, dont des produits locaux dans un périmètre d’une cinquantaine de kilomètres. Nos légumes viennent tous de maraîchers et maraîchères du coin, nos viandes aussi. Cela dit, c’est vraiment Marie-Fleur qui porte ce projet-là à bout de bras, au jour le jour. Elle a vraiment changé de vie, elle a tout vendu à Montréal, elle a déménagé avec son chum et ses enfants, elle a vraiment fait le grand move. Moi, je participe à distance à l’administration, à la philosophie des lieux et à certains partenariats avec des producteurs. 

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Kamouraska est vraiment devenue une destination...

Oui, alors qu’auparavant, c’était plus un lieu de transition pour le passage vers la Gaspésie. On sent qu’il se passe beaucoup de choses ici, qu’il y a beaucoup de jeunes qui investissent dans la région et qui se partent des business. Il y a comme une renaissance dans plusieurs régions; ça se vit aussi en Abitibi-Témiscamingue et dans la région de Charlevoix. Ce qui me réjouit le plus, c’est en fait la nouvelle déclaration d’amour d’une certaine génération par rapport à la vie rurale et la vie de région. 

Quand tu animes tes émissions, on sent que tu es captivé par les gens qui sont avec toi. Ta curiosité t’a-t-elle toujours amené à aller vers les autres?

Oui. Ce qui se passe en fait, c’est que je participe à des émissions dont les concepts permettent d’aller à la rencontre des gens. Ce sont des concepts assez rassembleurs, et Curieux Bégin, c’est quand même 15 ans de rencontres. J’ai toujours dit que ce n’était pas une émission de cuisine, mais un prétexte à la rencontre, parce que je ne suis pas un chef dans la vie. Pour ce qui est de Y’a du monde à messe, c’est aussi une autre façon d’aller à la rencontre des gens, et j’ai l’impression que ça a peut-être contribué à changer, disons, la perception que certaines personnes avaient de moi. À une époque, ce n’était vraiment pas unanime. J’étais très polarisant et je cultivais cette polarisation-là par toutes sortes de prises de position publiques qui ne faisaient pas, bien sûr, l’unanimité. Je pense que j’ai calmé ça et quand je parle maintenant, je le fais parce que j’ai l’impression que je peux contribuer à la conversation. Si j’ai quelque chose à dire, il faut que ça apporte quelque chose de neuf. Je pense différemment, en fait, et je parle à travers ce que j’écris, par exemple dans mon nouveau spectacle dont la première officielle aura lieu en octobre à l’Outremont. 

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Chose certaine, les gens aiment encore et toujours te voir animer et jouer!

Il y a quelque chose qui s’est établi avec le temps. Curieux Bégin, c’est beaucoup d’années de télé, avec Y’a du monde à messe, on vient de tourner la sixième saison et on s’enligne pour en faire une septième. Il y a donc quelque chose dans le temps qui fait en sorte qu’il y a des liens, disons ça comme ça, qui se tissent entre moi et les gens qui sont sensibles au travail que je fais.

C’est un spectacle plus audacieux que les précédents que tu vas présenter?

Je ne me suis pas censuré. C’est vraiment la parole d’un gars de mon âge qui s’interroge sur le monde dans lequel il vit. Il se rend compte que les affaires changent et qu’il n’a pas tou- jours la puck sur la palette. Le spectacle est encore en construction, mais je te dirais que 90 % du show est fait, et jusqu’à maintenant la réponse a vraiment été au-delà de mes espérances. Ma plus grande préoccupation par rapport à ce show-là était de me demander si j’avais encore quelque chose à dire et si ce que j’avais à dire était encore pertinent. Après l’avoir présenté en rodage à deux reprises, ces expériences me disent que oui, les gens ont envie de faire ce voyage-là avec moi. C’est un show drôle, mais il y a toujours cette asso- ciation entre le comique, le moins comique, le grave, le niaiseux et l’anecdotique. 

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Tu crois que le fait d’être très présent à la télé va inciter les gens à aller voir ton nouveau spectacle, Les 8 péchés capitaux?

Je pense que oui. C’est d’ailleurs peut-être ce qui explique que j’ai déjà un bel itinéraire de tournée (au moment où ces lignes sont écrites, des représentations sont prévues jusqu’en février prochain)

On te voit aussi dans Les mecs, et tu joueras bientôt dans Indéfendable. Es-tu étonné d’en être là aujourd’hui dans ta carrière?

Jamais je n’aurais pensé avoir la trajectoire que j’ai eue dans mon métier. Je suis choyé, parce que lorsque j’ai commencé l’animation, on ne m’a jamais enfermé dans une case. J’ai continué à jouer, j’ai créé il y a 25 ans une compagnie de théâtre avec Les éternels pigistes et j’ai aussi écrit. J’ai diversifié et multiplié mes terrains de jeux, mais jamais je n’aurais cru avoir cette trajectoire-là. Le mot gratitude est très souvent galvaudé, mais je suis obligé de dire que je suis quotidiennement reconnaissant de ce qui m’arrive. Ça fait 38 ans. Il y a eu des passages plus houleux, mais depuis une bonne quinzaine d’années, c’est constant et on me propose toujours de nouvelles affaires. Je n’ai jamais eu de plan de carrière, je n’y crois pas, et je constate qu’à l’âge que j’ai, on a encore envie de travailler avec moi et on croit que je peux aussi porter des projets. C’est assez exceptionnel, je dirais.

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À ton avis, quelle est la plus grande différence entre toi et ton personnage de Christian dans Les mecs?

Il y en a beaucoup, parce que Christian, dans Les mecs, est homophobe et à la limite de la misogynie. À part de porter le même prénom, il est très différent de moi. On partage peut-être l’idée de vieillir, avec laquelle je ne suis pas en paix. Ce n’est pas l’affaire que je trouve le plus le fun sur la Terre, parce que j’ai l’impression que je n’aurai pas le temps de faire tout ce dont j’ai envie. Faire des choix est parfois difficile pour moi, parce que je veux tout! Sinon, ce Christian-là est très différent de moi.

Christian, tu auras 60 ans en 2023. Prévois-tu prochainement mettre la pédale douce?

Chaque fois que je dis que je veux ralentir, tout le monde part à rire autour de moi. Je n’arrive pas à faire ça, c’est un genre de mensonge que je me raconte. Je suis en train d’apprendre à vivre en paix avec le fait que je ne vais jamais ralentir, que c’est dans ma nature profonde. Je suis comme ça, je pars toujours cinquante mille projets. Je réalise que, lorsque je ne fais rien, je ne suis pas bien. J’ai l’impression que c’est la vie, éventuellement, qui me forcera à ralentir. 

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Tu joues aussi un autre rôle, celui de père! Comment va ton fils?

Mon fils va avoir 30 ans cet automne. Plus le temps avance, plus notre relation s’enracine dans quelque chose de neuf, parce que c’est un jeune adulte qui a sa vie. Il a passé quatre ans à Séoul, il est maintenant établi ici, il s’est marié et a un super job, sa vie va bien. Et la nature de nos rapports se transforme aussi. Il s’accomplit, et je suis très fier de voir sa trajectoire et la façon dont il se déploie dans la vie. C’est un gars qui a rebondi de mille façons, qui a lui aussi connu plein d’adversité et qui a réussi à faire de belles choses de sa vie. Vraiment, ça va super bien avec mon fils. 

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