En couple depuis plus de 10 ans, Dorothée Berryman fait le choix de vivre seule

Photo : Patrick Seguin

Érick Rémy

2022-03-08T19:40:10Z

Son condo, tout comme elle, est discret, raffiné et chaleureux. Les murs bourgogne, le tapis pâle, le petit piano à queue au centre, les meubles anciens et asiatiques autour, tout s’agence. La vue sur le fleuve et la luminosité qui en émane est enveloppante. Durant une heure, la femme, comédienne et artiste de jazz qu’est Dorothée Berryman nous a ouvert les portes de son univers.

«Il y a 24 ans, lorsque je me suis installée ici, je m’étais débarrassée peu de temps avant de tout ce que je possédais. J’ai recommencé ma vie à zéro. Ç’a été une bonne chose. Je me suis fait un petit nid d’où j’ai pu m’envoler et revenir», confie Dorothée, dont le regard est empreint de gratitude. À l’orée de ses 74 ans, l’artiste ne s’est jamais sentie aussi bien. N’ayant eu aucun recours à la chirurgie esthétique, Dorothée Berryman cultive son bonheur en entretenant au quotidien sa forme physique et sa souplesse vocale. «Si, au début de la pandémie, j’avoue avoir un peu perdu mon équilibre, je me suis ensuite affairée à retrouver mes repères. Je marche près de deux heures par jour. Et, pour ce qui est de la voix, j’ai dû longtemps faire mes exercices de chant sans ma professeure. Ses enseignements me permettent de garder la précision de mon instrument et m’amènent à sa redécouverte constante. Un piano, ça peut s’accorder, mais pas la voix», explique l’acTrice qui est aussi une chanteuse de jazz.

Publicité

Passion jazz
Partout chez elle, joliment rangées, des piles de livres et de disques d’artistes légendaires du jazz sont à portée de main ou d’oreilles. Malgré cette abondance de musique, le silence est roi dans sa demeure. «Lorsque je lis, c’est dans le silence, et lorsque j’écoute de la musique, je ne fais que ça.» Elle s’est aussi mise à la méditation. «J’en fais au moins une heure par jour. J’ai commencé ça peu de temps avant la pandémie. Je suis allée pendant 10 jours au centre Vipassana, à Montebello. Au début, ç’a été dur d’être dans le silence, mais à la fin de mon séjour j’ai presque regretté de devoir reparler. (rires) J’ai trouvé ça extraordinaire. La méditation fait à présent partie de ma routine et me prépare à affronter chaque journée. C’est une connexion avec moi-même. Elle apporte énormément, puisqu’elle aide à éliminer les tensions et les négativités mentales qui nous rendent malheureux.»

Les artistes qui vibrent et s’inspirent de tout ce qui les entoure sont parfois plus sensibles. Se sent-elle forte ou fragile face aux difficultés? Elle répond: «Je m’aperçois que mon ancre est pas pire. (rires) Chaque fois que je sens une peur surgir ou que j’ai un grand questionnement, je consulte mon psychologue. C’est très important d’avoir quelqu’un pour te sortir d’une fausse croyance ou d’une inquiétude. Il faut mettre des mots sur les maux. Même si de l’extérieur j’ai l’air calme, il m’arrive d’être anxieuse ou inquiète. Je suis consciente de cet état d’âme qui parfois m’habite. Lorsque la bibitte se pointe, je peux mieux l’affronter! (rires)»

Publicité

Amour et liberté
Dorothée Berryman, qui n’a pas d’enfant, est en couple depuis une dizaine d’années. L’heureux élu, dont elle ne dévoile pas l’identité, n’habite pas avec elle. «Ça fait 24 ans que je vis seule ici. J’aime ma solitude. J’ai toujours aimé avoir mon espace. Je veux conserver ma liberté et mon indépendance. Il respecte mon intimité, ma vie privée, mon travail. Nous avons des goûts communs et aimons voyager ensemble. Il aime le théâtre et le cinéma. Sinon, j’ai aussi 10 neveux et nièces, dont quatre vivent à Montréal. Je suis vraiment très choyée.»

Un talent intact
Outre son bonheur dans sa vie personnelle, la comédienne se voit encore offrir de beaux rôles. Récemment, elle a tourné dans la troisième saison de La faille et a repris son rôle de mère adoptive de Tina dans Toute la vie. Puis elle a joué dans Mourir en vie, un court métrage mettant en vedette Marcel Sabourin, Élise Guilbault et Benoît Brière, qui l’a aussi réalisé. Le scénario, écrit par le Dr Jean-François Chicoine, raconte l’histoire d’un père âgé et malade demandant à son fils de l’aider à mourir. «Cette histoire vraie est inspirée de la vie de Luc Chicoine, pédiatre et professeur, père de Jean-François. J’ai su par Benoît, pendant le tournage, qu’il m’aimait bien. C’est d’ailleurs ce qui l’a incité à suggérer mon nom pour le rôle de sa mère. Cela m’a beaucoup touchée. Le film ne traite pas de l’aide médicale à mourir, mais plutôt du goût de s’accrocher à la vie.»

Publicité

Pensées sur la mort
Dans la foulée, il était à propos de demander à Dorothée ce qu’elle pensait de la finalité qui nous attend tous. «Ma mère est décédée des suites de l’alzheimer. Même si j’ai vu la mort de près, celle de ma mère, je n’arrive pas à m’imaginer ce que c’est. (Elle fait un long silence.) En fait, la mort m’aide à vivre. Elle m’incite à ne pas gaspiller ce temps-là. Tous les matins, je récite une phrase: “Si cette vie qui bat le vent de mille maux est plus fragile encore qu’une bulle sur l’eau, il est miraculeux, après avoir dormi, inspirant, expirant, de s’éveiller dispos.” Ces mots sont de Nagarjuna, un moine philosophe né en Inde 150 ans après Jésus-Christ.» 

Lisant d’autres citations tirées de son cahier, Dorothée s’arrête sur une phrase d’Albert Camus qui résume sa philosophie de vie: «“La vraie générosité envers l’avenir consiste à tout donner au présent.” C’est là le travail le plus important. Il nous faut être là et présent dans chaque instant, dit-elle en guise de conclusion. C’est difficile, mais quand on a la chance d’être en santé, c’est une bénédiction.» 

On peut voir Dorothée dans Toute la vie, le mardi à 20 h, à Radio-Canada.
La troisième saison de La faille sera présentée d’ici la fin de l’année sur Club illico.

Publicité

À VOIR AUSSI: 10 Contes pour tous à voir et à revoir 



À VOIR AUSSI: Les vedettes québécoises immortalisées sur une murale à Montréal

Publicité

Sur le même sujet