Elle veut changer la manière dont on célèbre la mort de nos proches
François Breton-Champigny
«Je pense que beaucoup de gens sont tannés des salons funéraires froids et austères», lance d’entrée de jeu Érika Scott Giasson, la fondatrice de l’agence Muna, qui a pour mission de célébrer à l’aide d’un événement personnalisé le passage sur terre d’une personne décédée.
«Que ça soit un petit souper tout simple avec la famille du défunt ou une grosse réception de 2000 invités sous un chapiteau, on s’occupe de tout, explique la jeune entrepreneure de 27 ans. On veut vraiment que l’événement soit joyeux et à l’image de la personne décédée.»
L’objectif derrière Muna est d’offrir une alternative à ceux qui souhaiteraient honorer leur mort différemment. «Je veux montrer aux gens qu’il est possible de sortir du carcan traditionnel des funérailles et d’avoir du fun tout en se remémorant la personne que l’on a connue.»
Les clients de Muna peuvent choisir la date à laquelle ils souhaitent célébrer la vie de leur proche, que ce soit dans la semaine suivant le décès, le mois d’après ou même un an plus tard.
Seule dans son embarcation pour le moment, Érika compte sur un bottin de contacts (traiteurs, fleuristes, musiciens, etc.) bien rempli pour mener son mandat à terme.
Comme son entreprise est en démarrage (Muna a été créé en novembre dernier), elle n’a pas encore eu la chance d’organiser une fête. Mais l’entrepreneure reste optimiste.
«J’avais un kiosque au Salon de la mort de Montréal et il y avait vraiment un engouement pour mon projet. Des personnes de tout âge venaient me voir pour me poser des questions et me dire à quel point c’était une bonne idée. Il y en a même qui voulaient aller prendre un café afin qu’on arrange leur propre party de célébration de vie lorsqu’ils ne seraient plus là!»
L’événementiel dans les veines
Avec un baccalauréat en administration de HEC en poche, la Lavalloise a créé sa propre boîte d’événementiel, Erika Co., après quelques expériences dans le milieu, notamment pour C2 Montréal. «J’ai toujours voulu faire de l’événementiel. J’ai ça dans le sang.»
Se concentrant surtout sur la planification de mariages et d’événements corporatifs avec sa première entreprise, la femme d’affaires a décidé de tenter sa chance dans la célébration de vie à la suite d'un drame personnel.
«Lorsque mon grand-père est décédé, on a fait une cérémonie dans un salon funéraire, comme tout le monde. Pour rendre ça moins glauque, on a fait des jokes pendant les discours et on a fait le party après. Je me suis rendu compte que le passage vers l’au-delà ne rime pas forcément avec des funérailles traditionnelles et impersonnelles.»
Érika a constaté que son entourage partageait sa réflexion. Elle y a vu une occasion d’affaires, puisqu’il n’y avait pas vraiment d’entreprise de ce type à Montréal. C’est ainsi que Muna a vu le jour.
Changer les mentalités
Même si l’ambitieuse vingtenaire croit à la viabilité de son projet, elle admet qu’il reste un long chemin à parcourir avant que les célébrations de vie soient aussi communes que les cérémonies au salon funéraire.
«Ça demeure encore assez tabou, d’aborder la mort différemment, reconnaît-elle. Mais je crois qu’avec une bonne campagne de marketing et une approche d’ouverture sur le sujet, on peut arriver à faire changer les choses.»
L’entrepreneure ne cache pas ses objectifs à long terme. «Sans qu’elle se transforme en une énorme entreprise avec des bureaux partout dans le monde, j’aimerais que Muna devienne la référence en événements de célébration de vie dans la province.»