Suzanne Champagne s’apprête à vivre le plus grand défi de sa carrière

Laurence Labat

Érick Rémy

2020-11-30T14:00:00Z

Cette année, pandémie oblige, Suzanne Champagne et ses collègues comédiens ne présenteront pas la rétrospective humoristique Revue et corrigée, une première en 16 saisons au Rideau Vert. Ce hiatus lui permet de prendre le temps de vivre, mais surtout de se préparer à relever l’un des plus grands défis de sa carrière.

L'autre jour, à l'épicerie, une dame m'a dit qu’elle allait s’ennuyer de ne pas me voir sur scène cette année. Même si la covid m’affecte, je choisis d’être dans la joie», lance Suzanne Champagne, qui compare cette pause à celles que l’on donne parfois à des terres agricoles pour en améliorer la fertilité l’année suivante. Elle parfait ses talents culinaires pendant que son amoureux, maintenant à la retraite, améliore sa technique de fabrication de pain artisanal. «J’ai enfin appris à me servir de ma mijoteuse! (rires) Mes amis disent que ma sauce à spaghetti est vraiment bonne. Je fais aussi un pâté chinois de type moussaka, à base d’aubergine et de chou-fleur, en plus d’une délicieuse tarte au yogourt.»

Face à la fragilité de la vie
Cette année, l’attachante actrice célèbre discrètement ses 40 ans de carrière. Les plus vieux se souviendront de son hilarante Sylvette Barbeau dans Jamais deux sans toi, et les plus jeunes, de Gisèle, la grand-mère de Mehdi Bousaidan, dans la série jeunesse Med, un rôle qui a contribué à rajeunir la moyenne d’âge de ses admirateurs. Parmi eux, Mariana Mazza, qui lui a même demandé de jouer une religieuse dans le film qu’elle a écrit et tourne en ce moment.      

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«Je sais qu’un jour tout va revenir à la normale. Cela me fait réaliser à quel point nous sommes tous connectés les uns aux autres. La vie est un cycle incessant. Il y a 100 ans, ma grand-mère mourait des suites de la grippe espagnole après avoir accouché de son huitième enfant, ma mère», dit-elle pour illustrer que la vie sera toujours plus forte que la mort. 

Cette bonne vivante est aussi très consciente de la fragilité de la vie. Elle y a été confrontée en décembre dernier: son neveu, Guillaume, est décédé subitement en pleine force de l’âge. «C’est arrivé au lendemain de ses 42 ans. Il marchait dehors avec une amie et il est tombé. Elle croyait qu’il avait tout bonnement glissé, mais en fait il avait fait une crise cardiaque foudroyante.» Émue, elle avoue qu’au moment du drame, elle a dû retenir son chagrin puisque tous les soirs, elle était sur scène à faire rire les spectateurs dans Revue et corrigée

Le Journal de Québec
Le Journal de Québec


Un grand défi de jeu
L’an prochain, Suzanne Champagne aura 65 ans. Ce cap ne l’effraie pas, au contraire. Elle mise sur sa bonne génétique en évoquant sa maman, Antoinette, qui a vécu jusqu’à l’âge vénérable de 94 ans. «Même si cela commence à paraître, j’accueille et j’accepte mon vieillissement. J’aimerais devenir une personne très âgée. Je me vois faire le métier aussi longtemps que Janine Sutto», dit-elle, se remémorant avec émotion la grande comédienne. 

Si c’est surtout grâce dans la comédie qu’elle s’est illustrée, bientôt, elle pourra montrer une autre facette de son talent. Partant du tissu original de la pièce César et Drana, qui a été traduite en cinq langues et acclamée partout dans le monde, l’auteure Isabelle Doré lui a taillé sur mesure une pièce à un personnage, Drana, qui sera sûrement un tournant dans sa carrière. «Je jouerai le rôle d’une vieille femme clown. Elle est au milieu de nulle part et son cheval meurt. C’est un extraordinaire monologue de 1 heure 15 minutes seule sur scène, à la fois irréel et touchant. Ça sera plus dramatique que comique, mais puisqu’elle est clown, il y aura aussi des moments de douce légèreté. Il y a longtemps que je rêvais de pouvoir jouer un rôle dramatique. Cependant, à cause de la pandémie, je ne sais toujours pas quand ni où la pièce sera présentée», explique-t-elle.

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Photo : Frederic Auclair / TVA
Photo : Frederic Auclair / TVA

Photo : Laurence Grandbois Bern
Photo : Laurence Grandbois Bern


Adepte du silence et des chats
Grande adepte du tai-chi, la sympathique actrice savoure le temps et les silences qu’impose cette nouvelle réalité. Elle aime particulièrement faire de longues marches dans le cimetière près de chez elle où, selon la saison, des arbres immenses tapissent d’ombres ou de feuilles ses pas et réflexions. «Mes silences ne sont pas vides. Ils sont grands et riches. Cela me permet d’être davantage dans le moment présent. Je ne vais pas sur les réseaux sociaux, je préfère parler longuement au téléphone avec mes amis. J’ai une bonne écoute.» 

Si nombre de ses amies sont grands-mères, l’artiste, qui n’a jamais eu d’enfant, ne s’estime pas pour autant en reste. «Je suis mère de chats tabbies: Ti-Gus et Zazou (un mâle de 13 ans et une femelle de 5 ans). Je parle à mes chats comme s’ils me comprenaient. Quand nous écoutons la télé, nous en avons chacun un sur nos genoux. Avant Zazou, nous avions Ti-Mousse (nommé en référence au duo humoristique légendaire formé par Réal Béland et Denyse Émond). Même s’ils avaient passé toute leur vie ensemble, Ti-Gus n’a pas été affecté par la mort de Ti-Mousse. Je crois que son attitude de détachement nous a aidés à faire notre deuil et à accueillir Zazou pour la remplacer.» 

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Puisqu’elle est pétillante, rafraîchissante et s’appelle Champagne, estime-t-elle qu’avec les ans elle devient une grande cuvée? «(Rires) Je ne sais pas si j’en suis devenue une, mais j’aime beaucoup le champagne. C’est dur de se définir soi-même. Disons que je suis en devenir. Je suis une femme libre qui fait attention aux autres femmes. Malgré ce que nous vivons en ce moment, il faut que le meilleur et le plus beau de l’humain l’emportent», conclut-elle avec sagesse.
     

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