Jonathan Defoy: l’entrepreneur héros qui élimine le gaspillage alimentaire
Myriam Lefebvre
Sa dernière application est sur toutes les lèvres. FoodHero, qui crée un marché secondaire d’invendus des épiceries pour contrer le gaspillage, a cumulé en quelques mois près de 100 000 utilisateurs et les aliments sauvés du dépotoir avec cette technologie se calculent en tonnes. Portrait de Jonathan Defoy, l’entrepreneur qui permet d’être plus vert et de sauver beaucoup de sous.
À peine âgé de 10 ans, Jonathan Defoy s’emparait de toutes les jobines de son quartier, à Saint-Romuald. «Je passais Le Soleil et le Journal de Québec en même temps [...] Je me levais à 5h du matin et j’avais donc deux runs de journaux. Je pelletais pour le voisinage et je tondais le gazon», raconte-t-il.
Dans sa vie de jeune adulte, c’était les fêtes étudiantes qui le stimulaient. Jouant le rôle de promoteur, il organisait d’énormes rave party avec des milliers de personnes.
Répondre à son propre besoin
Souhaitant se lancer en affaires sans avoir tout le bagage nécessaire, Jonathan Defoy a fondé sa première compagnie en répondant à ses propres besoins. Nommée Biztree, la start-up proposait un logiciel de modèles de contrats et de documents d’affaire pour les entreprises en démarrage. Tout est dans tout.
Avec plus de 25 millions de téléchargements et des ventes dans 200 pays et territoires, Biztree était un succès sur toute la ligne. Mais ce n’était pas assez. «Un entrepreneur ne reste pas longtemps satisfait. J’aime dire que c’est à la fois un fardeau et une bénédiction», affirme celui qui a mené d’autres projets de front en parallèle avant de quitter officiellement le bateau.
En cas d’échec, savoir rebondir
«Je m’étais levé en pleine nuit avec une vision, en me prenant un peu comme Steve Jobs», relate Jonathan Defoy quand il se livre sur Vetailr, le concept de magasinage sur vidéo en direct qu’il a entièrement conçu. L’illumination était là, mais le manque de financement et quelques difficultés techniques lui ont nui. «Ça a été mon gros échec», dit-il.
Et pourtant, il allait s’empêtrer de plus belle avec Offline, une application mobile de réponses automatisées universelles se synchronisant dans les services de messagerie et apps de communications de ses utilisateurs. Manquant de levier sur des questions de sécurité devant de plus gros joueurs que lui, il a été forcé d’abandonner un autre navire.
Rebondir en héros
«Michael Dell, avait dit "It’s all about how you bounce back"», lance Jonathan Defoy. Son effet de rebond, il l’a ressenti en regardant un reportage sur le gaspillage alimentaire. «Là, les fils se sont tous connectés», s’exclame-t-il. Souhaitant plus que jamais avoir un impact social, il avait enfin trouvé une cause qui le motivait. «J’ai une auto électrique depuis longtemps [...]J’ai toujours eu un problème fondamental avec le gaspillage.»
Considérant qu’il était écoanxieux avant même que le terme n’existe, Jonathan Defoy a enfin l’impression de pouvoir faire bouger les choses même s’il a dû être patient avec les grandes chaînes de supermarchés à la naissance du projet.
L’attente a porté ses fruits. Jonathan Defoy et son équipe de 20 employés ont convaincu Sobeys et Métro d’embarquer dans leur initiative.
Quelques clics pour sauver des tonnes
L’application est simple d’utilisation. En indiquant sa localisation, l’abonné voit apparaître les épiceries et produits offerts en rabais. Ceux-ci sont des invendus, mais sont 100% consommables. Le panier se paie directement sur l’app et la commande se prépare ensuite pour la cueillette en magasins.
Aussi ludique, FoodHero calcule le CO2 équivalent sauvé, le poids soustrait du dépotoir et le total d’économies faites. Cela incite bien des utilisateurs, puisque certains ont déjà commandé plus de 80 fois.
Avec la hausse de prix du panier annoncée, et la période des fêtes qui est toujours signe d’économies en janvier, le fondateur croit que la demande sera encore plus grande en 2020. Il souhaite poursuivre sa croissance au Canada, gagner un plus grand nombre de joueurs et même poursuivre son ascension chez les voisins du Sud.
«Moi, j’ai des plans pour adresser ça (la situation) dans l’écosystème au complet», dit celui qui observe également les épiceries indépendantes, les fermes et l’industrie de la restauration. «La dernière frontière, ce sera le gaspillage à la maison», dit-il sans vouloir partager toutes ses idées de héros alimentaire.