Entrevue avec Alec Pronovost, réalisateur de la série Le Killing
François Breton-Champigny
La première fois que j’ai entendu parler d’Alec, j’étais encore un étudiant affublé du gear de la délégation de l’UQAM des Jeux de la Communication (les meilleurs, évidemment) et j’étais assez impressionnable.
Il avait réalisé une vidéo de présentation des hasbeens (des vieux sages qui donnent des conseils aux nouveaux délégués tout en gossant ceux des autres délégations) de Concordia et j’avais trouvé ça franchement drôle.
Quelques années plus tard, le barbu bouchervillois de 26 ans a cumulé plusieurs distinctions sur la scène humoristique au Québec, notamment en signant des capsules web pour Julien Lacroix, Rosalie Vaillancourt et David Beaucage, et en créant sa propre série loufoque Le Killing, mettant en vedettes des humoristes comme Anthony Montreuil et Jay Du Temple.
J’ai profité de la récente sortie de la saison deux de la série, qui a amassé plus de 400 000 visionnements depuis son lancement en 2019, pour lui parler des réalités financières qu’impliquent d’être réalisateur en humour au Québec.
Avec le succès que tu as connu dans les dernières années, es-tu capable de vivre de la réalisation?
Alec : Étonnamment, oui. Mais ça m’a pris un certain temps.
Quand j’ai commencé, je m’occupais de la réalisation et du montage des capsules pour les humoristes avec qui je travaillais. Disons que ça me permettait d’arrondir les fins de mois et de me garder hors de danger des dettes. Je gagnais plutôt ma vie avec des petits contrats corpos en publicité.
Depuis un an et demi, j’ai la chance de pouvoir vivre pratiquement juste de la réalisation. J’ai pu travailler sur des gros shows de télé, faire des campagnes de pub pour le Zoofest et Le Festif de Baie-St-Paul et avoir du financement pour ma série. Mettons que ça fait du bien au budget!
Comment est-ce que tu t’es rendu à faire de l’humour?
Alec : Dès l’enfance, j’ai su que j’allais graviter dans l’univers de l’humour. Je tripais sur les films de Judd Apatow et je voulais faire ma propre marque.
Je me suis donc inscrit au bac en cinéma à l’UQAM. Après mes études, j’ai commencé à travailler avec Julien Lacroix, que j’avais connu pendant mes années d’improvisation, pour élaborer des capsules sur le web. Au début, je faisais ça pour le plaisir, puisque ce n’était pas vraiment payant, mais petit à petit, je me suis fait approcher par d’autres humoristes qui aimaient mon travail pour réaliser leurs projets et c’est là que ça a décollé.
Après un certain temps, j’ai décidé de me concentrer sur mes propres projets. J’ai développé Tony Speed, un court métrage dans lequel j’ai mis beaucoup d’efforts. Ensuite, j’ai cogité sur un concept autour du thème des camps de jour avec mon ami et coscénariste Alexandre Pelletier et quelques mois plus tard, Le Killing a vu le jour.
Quels sont les défis auxquels on doit faire face en tant que réal dans ce milieu-là?
Alec : Un des plus gros défis en termes de temps et d’énergie est d’aller chercher des subventions. C’est énormément de paperasse écrite dans un jargon difficile à comprendre et si on ne le fait pas comme il le faut, ça se peut que notre demande soit refusée et que le projet plante.
Un autre défi d’un point de vue moral est d’accepter que pour gagner sa vie, ça se peut qu’on soit obligé de faire des contrats un peu plates. J’ai dû piler sur mon orgueil quelques fois pour pouvoir payer mon loyer et financer mes projets personnels. Ça fait partie de la game!
Quels sont tes plans pour le futur?
Alec : Idéalement, j’aimerais mettre en branle un premier long métrage de comédie ou conceptualiser mon propre show télé dans les cinq prochaines années. Je souhaiterais également développer mes habiletés en pub. Ça fait un an que je suis représenté par la boite de production Morrison comme réalisateur donc je suis toujours en train de faire ma place.