Après 12 ans dans Virginie, Chantal Fontaine ne fermerait pas la porte à rejouer dans une quotidienne

Karine Lévesque

Patrick Delisle-Crevier

2022-11-16T12:00:00Z

C’est au lendemain de son anniversaire de naissance que la comédienne est venue s’asseoir dans notre fauteuil coloré. Depuis quelques jours, nous la retrouvons dans la série Ma mère, sur les ondes de TVA. «C’est mon plus grand défi d’actrice à ce jour», me dit-elle. Elle se confie sur ce nouveau défi, revient sur sa vie de famille, sa cinquantaine heureuse et sa carrière.

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Chantal, tout d’abord, comment vas-tu?

Je vais très bien. J’ai célébré mon 57e anniversaire hier. J’ai passé une magnifique journée tranquille à la campagne. J’ai fait de grandes marches en forêt avec mon chum, une petite séance de physiothérapie, puis j’étais de retour à Montréal. J’étais couchée à 21 h. Je suis rendue sage.

Que représente cet âge pour toi?

Honnêtement, l’âge ne me dérange pas tant. Peut-être que le 60 qui approche va fesser plus fort. À 57 ans, je suis en forme et heureuse. Je fais ce que je veux dans la vie et je suis bien entourée. J’ai un nid aimant et solide qui me rend heureuse. Alors, pour le moment, vieillir ne me dérange pas.

Karine Lévesque
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As-tu l’impression que les rôles qu’on t’offre sont différents en fonction de ton âge?

Si c’est une réalité qu’il y a moins de rôles pour les femmes vieillissantes, cela ne me touche pas cette année. J’ai de beaux rôles secondaires dans C’est comme ça que je t’aime ou encore Un lien familial, qui sont tellement le fun à jouer! Dans ce type de projet, tu n’as pas la série sur tes épaules; tu te sens plus léger. Il n’y a pas la pression d’un premier rôle. On m’offre vraiment des rôles différents, et je ne ressens pas que l’âge est un handicap. Il faut dire que nous vivons dans une société qui est de plus en plus vieillissante; donc, si on souhaite représenter cette réalité, il va falloir penser à écrire des personnages plus vieux. J’ai espoir qu’il me reste encore de belles années durant lesquelles le mot retraite n’existera pas. J’ai envie de continuer à faire ce métier encore longtemps.

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J’ai l’impression que tu as la cinquantaine heureuse!

Oui, vraiment! De plus, depuis la fermeture de mon restaurant, j’ai moins de responsabilités. C’était énorme comme charge de travail. Et ça envoyait aussi le message dans le métier que je n’avais pas le temps de jouer des rôles. J’avais donc moins de belles propositions. Aussi, j’ai plus de temps à consacrer à mes petits-enfants, à mes enfants et à mon chum, qui est fraîchement retraité. Maintenant qu’il est à la maison, il fait plein de choses autour de notre maison de campagne.

Est-ce que le fait d’avoir un conjoint à la retraite te donne envie de ralentir encore plus?

Non. Ça fait du bien d’avoir un homme à la maison — je mets quelques projets dans sa to-do list —, mais je n’ai pas envie de prendre ma retraite ou même de ralentir. J’ai un bel équilibre en ce moment, que j’aimerais garder. 

Karine Lévesque
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Quel a été ton premier rôle en carrière?

Mon premier véritable contrat était une publicité pour la bière Budweiser. Je devais avoir 19 ans. Ensuite, il y a eu le téléroman L’or du temps, dans lequel je jouais la Dre Geneviève Lapierre. J’étais très heureuse de décrocher un tel rôle. Cependant, quand je me regarde, je trouve que j’avais une petite voix haut perchée. J’ai l’impression de voir ma fille, Camille. J’ai appris mon métier une journée à la fois et une scène à la fois. J’ai eu la chance de jouer avec du beau monde et j’ai toujours plus travaillé en télévision. Je n’ai jamais tourné le dos au théâtre, mais on n’a jamais pensé à moi pour ça.

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Est-ce que ça a fonctionné tout de suite pour toi en sortant de l’école de théâtre?

Je ne suis jamais sortie de l’école, puisque je n’y ai pas terminé mes études! Je suis partie après une année et demie pour me rendre en Californie. J’avais 19 ans. J’étais une fille de Saint-Hyacinthe qui n’avait encore rien vu. J’avais besoin de voir du pays. La Californie était mythique, c’était le rêve. Mais je n’avais pas un sou en poche, alors je n’ai pas fait long feu. Quand je suis revenue, je me suis installée à Montréal et je suis entrée en rébellion contre mon métier. J’avais l’impression que les acteurs étaient de simples marionnettes, alors je me suis lancée dans la photographie. Après avoir fait mes études, j’ai travaillé dans des publicités et, un jour, je me suis retrouvée à photographier la comédienne Sylvie Drapeau, lors d’une répétition de théâtre. J’étais sur scène avec elle et je me suis rendu compte que ce n’était pas derrière une caméra que j’avais envie d’être. J’ai alors fait la paix avec le métier d’actrice. Puis j’ai commencé à travailler et à décrocher quelques rôles ici et là. Ça m’a donné la chance d’avoir mes enfants.

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Avec le recul, que retiens-tu de ton rôle de Virginie?

Il est arrivé juste à temps dans ma vie, car mes deux enfants étaient assez vieux pour que je puisse jouer un rôle aussi exigeant. J’avais eu le temps d’être une maman présente; c’était important pour moi. Je voulais des enfants alors que j’étais jeune: je voulais ma famille avant ma carrière. Virginie a été une expérience magnifique, et je me considère chanceuse d’avoir vécu ça. Je travaillais très fort, mais je gagnais bien ma vie. Et même si les journées de tournage étaient longues, j’étais à la maison à 18 h 45 et j’avais un mois et demi de vacances durant l’été. Ce rôle m’a permis de me construire en tant qu’actrice et de m’asseoir financièrement. De plus, j’ai pu jouer avec beaucoup de comédiens. Ç’a été une grande école. À l’époque, jouer dans une quotidienne, c’était une nouvelle réalité, et j’ai pu apprendre une autre façon de travailler.

Est-ce toi qui as manifesté le désir de quitter Virginie?

Oui. Je ne voulais pas que Virginie soit la seule chose inscrite sur mon CV. J’avais besoin d’autre chose. J’ai eu peur que l’étiquette de Virginie me colle trop à la peau. On m’avait d’ailleurs avertie que ce serait probablement le cas. On m’avait dit que je ne parviendrais pas à me dissocier de ce personnage que j’ai incarné pendant 12 ans dans 1350 épisodes. Mais j’avais confiance que je pouvais jouer encore et que je n’étais pas finie. J’avais l’intuition que je devais arrêter à ce momentlà, et pas attendre que l’émission se termine. J’ai eu besoin de bousculer les choses. 

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Est-ce que ç’a été difficile de voir une autre Virginie arriver dans l’émission et prendre ta place?

Pas du tout. J’aurais aimé que Stéphanie Blais et moi puissions plus jouer ensemble, mais on a vite été antagonisées. J’ai eu du fun et je suis restée professionnelle jusqu’au bout.

Tu as dit récemment à la télévision que Fabienne et toi aviez un peu manqué votre fin ensemble... As-tu des regrets?

On ne peut pas avoir de regrets. Fabienne et moi étions un couple professionnel très proche. C’est certain que quand l’un veut prendre le large, l’autre n’est pas content. Des fois, il faut que les choses se fassent de façon radicale, et c’est ce qui est arrivé. Aujourd’hui, tout ça est derrière nous. Fabienne et moi sommes réconciliées.

Est-ce que tu referais une quotidienne aujourd’hui?

Ça dépendrait du personnage. Le format ne me dérange pas, c’est le rôle qui m’inspire. Si on me proposait un rôle le fun et qui me tente, je le ferais probablement. Je sais maintenant que je n’ai pas envie de jouer des rôles qui ne sont pas attachés au squelette du scénario et qui ne viennent pas changer l’histoire ou y ajouter quelque chose. Je veux jouer des rôles qui font avancer l’histoire.

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Finalement, il y a eu un après-Virginie pour toi puisqu’un beau rôle est arrivé dans Yamaska!

Oui, je vais toujours me souvenir de cette soirée où l’autrice Anne Boyer m’a appelée pour me proposer le rôle de Julie D’Avignon. Quand j’ai raccroché, j’ai pleuré de soulagement et de joie. Après avoir été un an sans travailler, j’avais la certitude qu’il y avait une suite pour moi. Mes enfants et mon chum pleuraient de joie eux aussi. On s’est serrés fort, et ça a fait du bien. Ce personnage a été une belle aventure qui a duré sept ans.

Je reviens à Virginie... Est-ce que ç’a été difficile de concilier vie de famille et vie professionnelle dans une quotidienne?

Non, mais ça a exigé énormément de discipline. Le midi, pendant la pause du dîner, j’apprenais mes textes du lendemain et du surlendemain pour que je puisse être avec mes enfants une fois de retour à la maison. Il n’y avait jamais d’heures supplémentaires sur ce plateau: à 18 h 15, les caméramans se changeaient en citrouille, et je rentrais chez moi! Ça faisait de longues journées, mais ç’a été une belle période: j’avais une stabilité qui me permettait d’offrir une belle qualité de vie à mes enfants. Et j’avais du plaisir à jouer ce beau personnage.

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Quel genre de mère as-tu été?

Une mère très encadrante, protectrice et présente. Je disais toujours à mes enfants que si un jour ils considéraient qu’il n’y avait plus de solution pour eux, moi j’en aurais toujours une pour eux. Je ne voulais jamais qu’ils vivent un problème tout seuls. Je voulais qu’ils sachent qu’ils pouvaient compter sur moi. J’ai toujours été une alliée forte et aimante. Aujourd’hui, je suis très proche de mes enfants, qui sont des adultes accomplis. Nous sommes un clan soudé.

Et te voilà maintenant grand-maman!

Oui, je suis grand-maman cinq fois! Chacun de mes enfants a eu des jumeaux, et ma fille a aussi eu la petite Billie. Je tente d’être présente pour eux. C’est important pour moi que mes petits-enfants aient beaucoup de souvenirs avec leur grand-maman. Je veux faire une différence dans leur vie.

Durant la pandémie, tu as décidé de quitter ton condo du centre-ville pour te lancer dans un projet d’habitation bigénérationnelle avec ta fille...

Après la naissance de Billie, ma fille est tombée enceinte de jumeaux. Comme bien des jeunes, elle et son conjoint n’avaient pas la capacité d’acheter une propriété sur l’île. Alors en nous associant ensemble, nous avions un pouvoir d’achat plus grand; et j’aimais l’idée de me rapprocher de ma famille. Cela me permettait aussi d’aider ma fille qui avait trois enfants en bas âge. Puis, quand la pandémie est arrivée, ça m’a confirmé que c’était une très bonne idée. Nous étions dans un petit cocon ensemble, et ça nous a fait du bien. Ce fut une excellente décision! J’ai eu mes petits-enfants dans mes bras tout au long de la pandémie.

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Ton fils Ludwig et son conjoint, ainsi que leurs deux enfants, sont partis vivre à Los Angeles. Comment as-tu accueilli cette décision?

Ç’a été difficile. La bonne chose, c’est que mon fils nous a prévenus deux ans à l’avance, alors nous avons eu le temps de nous préparer à leur départ. Et nous y allons régulièrement. On se fait des FaceTime: la technologie facilite le contact! Ce n’est pas facile pour une maman louve de voir partir ses enfants si loin. Mais c’est sa vie, pas la mienne. Je suis heureuse de voir mon fils faire sa vie et son chemin. Il a 35 ans... Je pense que le cordon doit être coupé! (rires)

Et tu as visiblement trouvé l’homme de ta vie...

Ça fait 26 ans que nous sommes ensemble. Mon chum est peintre, mais il était aussi réalisateur de grosses émissions d’actualités internationales. Ç’a été difficile sur ce plan, ces deux dernières années; ça commençait à l’affecter d’être connecté sur tout ce qui se passe à travers le monde. Il a finalement décidé de prendre sa retraite, et j’ai retrouvé mon homme qui rit et qui a le coeur léger. Il ne regarde même plus les nouvelles. C’est un grand-papa extraordinaire qui tripe autant que moi! 

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Karine Lévesque

Tu as récemment tourné dans la série Ma mère. Ce tournage a-t-il représenté un défi pour toi?

Chantal, dans Ma mère, est un beau personnage qui a beaucoup de couches. Elle est atteinte d’une maladie mentale nouvellement diagnostiquée et fraîchement stabilisée. Elle sort de prison et tout ne va pas comme prévu. Instable, la maladie refait surface, mais elle souhaite tellement s’en sortir. C’est un rôle d’une grande intensité, très bien écrit, et c’est assez concentré. Toutes les scènes avaient une teneur dramatique, et j’en avais 164 à jouer. Ça a demandé beaucoup de travail, mais c’était un fantastique défi! Ç’a été un beau cadeau de jouer ça. Du grand bonheur d’actrice.

Il y a eu aussi Gisèle dans L’Échappée, Monique dans Un lien familial, la colorée Jeannine de C’est comme ça que je t’aime, etc. Tu n’as pas chômé ces derniers temps!

Ce sont tellement de beaux rôles, et ça fait du bien. Il y a eu une période plus calme durant laquelle j’étais surtout restauratrice, puis Fabienne Larouche m’a offert un beau rôle dans la série Clash. Ç’a été l’occasion d’une belle réconciliation entre nous, et nous nous sommes retrouvées avec plaisir. Après Clash, il y a eu C’est comme ça que je t’aime, dans laquelle je tenais un beau rôle secondaire qui est venu montrer que je pouvais jouer autre chose. Ça a ouvert une belle porte, et des rôles différents sont arrivés par la suite. Ça m’a sortie de ma zone de confort. J’aime jouer des partitions qui sont un peu plus champ gauche.

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Qu’est-ce qui s’en vient pour toi?

J’ai un autre beau rôle qui s’en vient dans la comédie dramatique Bon matin Chuck (ou l’art de réduire les méfaits). Sinon, je vais prendre du temps pour moi et profiter de la vie. Je veux continuer d’avoir un bel équilibre entre la vie de famille et mon métier.

En terminant, tu es marraine du Regroupement pour la Trisomie 21 et de L’appart à moi. Pourquoi ces causes te tiennent-elles à coeur?

Ça fait 30 ans que j’endosse cette cause parce que ma soeur a donné naissance à Étienne, qui est trisomique. Quand il est né, nous ne savions même pas ce que cette maladie représentait, et on proposait encore aux parents de placer leur enfant. Je m’implique pour faire la différence, parce que la réalité des personnes trisomiques change à différentes étapes de leur vie et il n’y a pas beaucoup de ressources pour les accompagner là-dedans. Le chemin n’est pas tracé. Il y a, entre autres, L’appart à moi, un édifice qui a été construit pour loger neuf jeunes ayant une déficience intellectuelle.

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