Changements climatiques: 10 secteurs aux perspectives d’emploi renouvelées (1/3)
Myriam Lefebvre
La décennie 2020 s’est amorcée avec des feux de forêt sans précédent en Australie, une éruption volcanique aux Philippines, un tremblement de terre au Mexique et même au Canada, un blizzard historique à Terre-Neuve. Depuis les années 1970, le réchauffement de la planète a multiplié par quatre le nombre de catastrophes liées au climat.
L’environnement sera sur toutes les lèvres au cours de la décennie. Les enjeux sont de taille et devront être appréhendés pour certains et confrontés pour d’autres, avec énormément d’ingéniosité. Pour les jeunes générations, cela signifie des perspectives d’emploi transformées et des domaines où l’on verra naître de nouvelles professions.
Voici le premier de trois volets portant sur ces secteurs aux perspectives d’emploi renouvelées en lien avec les changements climatiques.
1. Le tourisme, la richesse des expériences locales
Gestionnaire de campagne nationale pour Réalité climatique Canada, Matthew Chapman compare les vols par avion à la malbouffe.
«Comme quelqu’un qui veut perdre du poids, on va dire qu’on peut manger autant qu’on veut, pourvu qu’on coure pour compenser. Est-ce qu’on peut continuer à manger autant de malbouffe et compenser nos mauvaises habitudes? Il faut agir des deux côtés: en manger moins et compenser pour celle qu’on mange quand même», raconte-t-il. Bref, prendre l’avion moins souvent et compenser ses émissions de gaz à effets de serre.
Certains cessent drastiquement de voyager par avion, d’autres diminuent leur quantité de vols annuels. Le résultat? Plus de tourisme local. «Si on décide de voler moins, on va découvrir toutes sortes de beaux endroits près de chez nous», explique M. Chapman.
Les nouvelles entreprises aux thématiques originales et audacieuses misant notamment sur le tourisme expérientiel - qui tente de répondre à la quête de sens des touristes en prônant l’immersion - tireront assurément leur épingle du jeu. Et elles auront de quoi nous faire découvrir ou redécouvrir le pays.
Psst! Influenceurs voyage, pas besoin d’aller jusqu’à Cuba pour nous faire rêver, il y a un filon à exploiter dans notre coin de pays aussi!
2. Les finances et l’environnement ou savoir calculer en vert
Savoir intégrer des données dans des analyses financières est une chose, le faire avec des données environnementales en est une autre...et sa résultante est prometteuse.
Emmanuelle Tavernier est experte Impact carbone et Finance d’impact environnementale pour sa propre entreprise, Oxia Initiative. Son passé à la Caisse de dépôt et placement du Québec, puis à la COP (Conférence des Parties) lui a permis de réaliser un manque à combler qui mettait en phase son amour des finances et ses valeurs environnementales.
«Les entreprises qui sont cotées en bourse sont obligées de faire des analyses de gaz à effets de serre. [...] Par contre, pour toutes les sociétés qui ne sont pas cotées en bourse, toutes les 200 000 PME au Québec, ne font pas de bilan carbone», affirme-t-elle.
Depuis bientôt deux ans, elle planche donc à la création de Carboscope. «C’est un logiciel de comptabilité, sauf que nous, on traite de la comptabilité carbone. [...] Du coup, les PME pourront faire leur propre comptabilité carbone et savoir combien elles émettent de gaz à effets de serre à la fin de l’année et sauront comment les réduire avec une mesure carbone», indique-t-elle. Le logiciel sera officiellement lancé à la fin 2020.
S’étant d’abord inspirée de modèles européens pour développer son concept, Mme Tavernier arrive maintenant à quantifier de façon standardisée 80% des émissions importantes de chaque entreprise. «On prend tous les flux opérationnels qui vont créer des gaz à effets de serre dans une entreprise.» On y calcule des données comme le transport des ressources humaines (métro, voiture), les achats de matière première (plastique, aluminium), leur provenance, leur transport (par avion ou bateau), l’utilisation d’électricité, de mazout, etc.
Oxia Initiative est la seule entreprise du genre au pays et pourtant sa proposition est de plus en plus recherchée par les entreprises québécoises.
3. La chimie alimentaire et la chimie verte, la pleine expansion
Des chimistes de l’alimentation qui travaillent à inventer, par exemple, de nouvelles viandes végétales, ça existe. La marque Yves Veggie ou encore la chaîne de restaurants Copper Branch sont déjà plutôt bien établies sur le marché.
Il en est de même pour les produits nettoyants grâce à la chimie verte, une forme de technologie propre. Les produits québécois Attitude sont d’ailleurs en pleine croissance avec une présence dans plus de 40 pays.
Ce que l’on pourra découvrir au fil des prochaines années, ce sont de nouvelles compagnies offrant des produits biologiques et naturels, augmentant ainsi la variété de produits que l’on retrouvera sur les étalages. Et surtout, ces étalages s’élargiront au fil des années.
«Quand je me promène dans les épiceries montréalaises, je vois très peu de ces produits et quand je les vois, ils sont le double du prix des hamburgers réguliers, moins avantageux pour l’environnement. Quand on va mettre un prix sur la pollution, on va voir certains modèles d’entreprises réussir et tant mieux, ils vont créer de l’emploi. Et d’autres modèles ne vont pas réussir, et tant mieux parce qu’ils sont nuisibles pour le bien commun», explique Matthew Chapman.